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plénière de la paix, une commission, tantôt restreinte, tantôt plénière, de la Ligue ou Société des Nations ; au-dessus de toutes, une sorte de Conseil privé des cinq grandes Puissances, dénommées « Puissances à intérêts généraux, » le Conseil des Dix ; et, à côté de ce Conseil, composé des mêmes personnes, avec adjonction de militaires, et siégeant dans une autre forme, un Conseil suprême de la guerre. Cela, c’est ce que le public voit, c’est ce qu’on nous laisse entrevoir, et ce qui fait, pour la jubilation des badauds, que nous n’en sommes plus aux jours obscurs de « la diplomatie secrète ; » chaque soir, le journal nous apprend que la commission des affaires tchéco-slovaques ou la sous-commission du travail des femmes s’est réunie et qu’elle se réunira de nouveau vendredi à 10 heures. Quel progrès sur les habitudes du règne déjà lointain de Charles X où, un matin, la Quotidienne mesurait si avarement les confidences en ces termes : « Le roi est allé à la chasse, après avoir entendu la messe, » et, le lendemain : « Le roi a entendu la messe ; après quoi, il est parti pour la chasse ! » Pour nous, qui respectons les lois des genres, et qui savons que, par sa nature, la diplomatie est secrète ou qu’il n’y a plus de diplomatie, que les grandes affaires ne peuvent se traiter sur les places ou dans les carrefours, nous ne nous indignons pas de n’en pas connaître davantage ; mais nous aimerions qu’on renonçât à nous en faire accroire, à nous jeter de la poudre aux yeux, sous prétexte de nous les tenir ouverts ; et surtout nous ne voulons pas contribuer à nous éblouir et à nous aveugler nous-mêmes. Peu nous importerait de savoir heure par heure ce que fait, et moins encore ce que va faire la Conférence, si nous étions sûrs qu’elle fait quelque chose et si nous sentions que ce qu’elle fait est bon, ou simplement que ce qu’elle fait est fait.

D’ailleurs, derrière toutes ces commissions et sous-commissions qu’on nous montre par le coin soulevé du rideau, il y a encore d’autres commissions et sous-commissions qui siègent aux étages inférieurs ou dans des locaux séparés. Nous sommes mal et parfois nous ne sommes pas du tout instruits de leur activité, ni même de leur existence ; mais il est certain qu’il en existe : il y a des commissions « interministérielles » mixtes de fonctionnaires et d’experts, pour discuter et arrêter sur chaque question l’attitude de chaque gouvernement. Il y a des « comités d’études » plus ou moins bénévoles à leur origine, plus ou moins reconnus et avoués dans la suite, qui ont, sur chaque question aussi, amassé, classé, digéré, élaboré, de la main des techniciens les plus qualifiés, les matériaux