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une commission qui elle-même nommera des sous-commissions dont chacune élira son bureau qui se choisira des présidents, des trésoriers et des secrétaires : il y en a pour deux ans et plus. Les buissons auront le temps de se défleurir, et l’eau de croupir au fond des bassins. Mais il est bien connu qu’aux prisons les plus sévèrement grillées et verrouillées il y a toujours une porte ouverte, par laquelle le plus simple est de sortir tranquillement. Rosette avise une porte oubliée sous un vieux lierre. Et voici le prince, accompagné de son aimable guide, dans le parc où il va d’émerveillement en émerveillement. Il découvre la nature. Notez que c’est la nature telle qu’on la voit dans un beau jardin. C’est une nature arrangée et peignée, avec arbres taillés, corbeilles de fleurs et vasques aux feuillages retombants. En fait de forêt vierge, il y a mieux. Mais sans doute Rosette a pensé que cela suffisait pour une première fois et qu’il convenait de ménager les transitions. C’est déjà plus qu’il n’en faut pour monter à la tête du jeune prince, — qui l’a faible, — et qui, se sentant envahi par une griserie délicieuse, s’informe auprès de Rosette si ce ne serait pas l’amour. A quoi cette petite personne, très avertie et dont les voyages ont formé la jeunesse, répond qu’aucun doute n’est possible :


Oui, c’est l’amour, Seigneur, dans toute sa puissance,
Avec son rauque appel, son masque d’innocence,
Et sa grande colère aussi.
C’est lui, le jeune dieu dont la lance de flamme.
Écartant les rameaux de l’antique forêt,
Pénètre aux flancs du cerf qui brame
Quand sur le gazon tendre une biche apparaît,
C’est lui qui met ses soins aux noces de l’insecte,
Qui s’attendrit le soir, et d’une perle humecte
Le calice brûlant des fleurs !
Son rire éblouissant de toutes parts éclate,
Dans le sol, sur la mer et dans l’air qu’il dilate.
C’est lui, l’amour cruel qui donne un charme aux pleurs...


Diverses aventures guettent les amoureux ; puis, comme il convient dans un Conte bleu, tout finira par un mariage : les heureux époux auront beaucoup d’enfants et ils leur donneront une éducation résolument sportive.

Il y a de très jolis vers dans la pièce de M. Porché. Je le crois doué surtout pour l’expression des sentiments généreux, délicats et tendres. Et c’est, je l’espère, dans ce sens qu’il poussera sa tentative de rajeunissement du théâtre par la poésie.