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Vient couper le pied du pilote.
Le pilote reste railleur,
Et, rattrapant son pied qui bouge
Dans le grand fuselage rouge,
Il le passe à son mitrailleur !

Mais, en bas, d’autres vont, sans ailes,
Prendre un aussi terrible essor.
On vient de placer les échelles.
C’est à dix heures que l’on sort.
Il se peut qu’un souvenir pleure ;
Il se peut qu’on regarde l’heure ;
L’heure au poignet n’a pas tremblé !
La Mort, naguère, aimait l’emphase ;
Mais, aujourd’hui, sur quelle phrase
Meurt-on au bord d’un champ de blé ?

Que disent-ils, ces grands poètes ?
Ils disent : « Je meurs, ce n’est rien. »
— « Deuxième section, faites
Votre devoir. J’ai fait le mien. »
Voilà quelles sont les paroles
Au bord d’un champ de féveroles !
« Avertissez le lieutenant
Qu’ils ont franchi la passerelle... »
— « Pour la France... je meurs pour elle... »
Corneille est simple maintenant !

A son commandant qui l’embrasse,
Effrayé de le voir souffrir.
Un soldat de deuxième classe
Dit : « Je suis heureux de mourir ! »
On lit sans trouver le mot « plainte. »
On trouve parfois le mot « crainte ; »
La crainte d’être évacué.
Oh ! comme à leur poste ils demeurent !
Comme ils y meurent ! Comme ilx meurent !
Lisons : « Tué... Tué... Tué... »