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CONDAMNÉE À MORT PAR LES ALLEMANDS.

papiers nécessaires, et nous pûmes constater que nous avions fort à faire dans cette région. Quelques officiers français et une soixantaine de territoriaux étaient, depuis la retraite de 1914, abrités dans des maisons particulières. Beaucoup avaient été recueillis par Mlle Lhotellier, directrice de l’hospice civil de Cambrai, et par Mme Baptistini, directrice d’un hôpital auxiliaire. Nous pûmes facilement convaincre les officiers que notre organisation était sérieuse. Nous décidâmes un premier convoi composé des officiers ; les soldats suivraient par groupes de six ou huit. Il fallait se borner ; les passeports étant exigés pour sortir de la ville, on ne pouvait en obtenir que peu à la fois et sur présentation, à la Kommandantur, de personnes sûres qui accepteraient de prêter leurs noms d’abord, leurs papiers ensuite. À notre retour, nous établîmes des postes de relais, car nous ne pouvions songer, Mlle Moriamé et moi, à rentrer dans Cambrai pour chacun des départs. Mmes Lhotellier et Baptistini se chargeaient de procurer les papiers avec le concours de M. Lambert, ex-secrétaire de la mairie. Le premier départ devait s’effectuer quatre jours plus tard. Nous quittâmes Cambrai ravies des dispositions arrêtées, et emmenant un Anglais, le seul qui restât en ville.

Une grosse désillusion nous attendait à Bellignies. La princesse de Croÿ, qui rentrait de Bruxelles, nous annonça que les passages étaient impossibles pour le moment, que miss Cavell était étroitement surveillée et avait subi déjà une perquisition domiciliaire. Nous reprîmes donc aussitôt la route de Cambrai afin de contremander le départ et d’informer les hommes que nous viendrions les prendre dès que le passage pourrait se faire sans trop de dangers. Mon arrestation était proche : je ne devais plus les revoir. L’un des officiers d’ailleurs mourut peu après ; un autre, ayant tenté le passage avec un contrebandier, fut arrêté et fait prisonnier ; les soldats continuèrent à se cacher, mais la plupart furent dénoncés et arrêtés un an après ; ils furent emmenés en captivité, ainsi que Mlle Lhotellier qui devint ma compagne à la prison de Siegburg.


MON ARRESTATION

À mon second retour de Cambrai, on m’annonça que des ouvriers métallurgistes de la région de Maubeuge étaient