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la cause de sa faute ; si elle le devint parfois, ce fut malgré elle. Il ne l’accuse de rien :


Car de mes mille maux, elle n’en sut pas un !


C’est l’amour des choses mortelles qui l’a mené jour par jour au point de détresse où il est. Il veut, avant de mourir, s’en délier, et n’avoir plus de désir que pour l’éternité :


Que du moins ma dernière larme soit dévote,
et qu’elle soit sans terrestre limon !


Si la Vierge sainte l’aide en sa peine, et le sauve, il lui promet d’être, pour toujours, tout à elle ; jamais plus il ne chantera d’autre Dame qu’elle :


O Vierge ! je consacre alors, je purifie,
en ton nom, mes pensers, mon génie et mon style,
et ma langue, et mon cœur, mes soupirs et mes larmes !


Il implore la Vierge avec une confiance sans limites. Il sait, comme saint Bernard dans son immortelle invocation, que jamais Marie n’a été suppliée en vain. Il sait qu’elle tiendra u pour agréables, ses désirs transformés. » Il se remet entièrement dans ses mains maternelles. Elle est la Vierge unique, la Vierge sainte. Elle le recommandera à son Fils, « vrai Homme, vrai Dieu ! »


Qu’il reçoive mon dernier soupir : in pace !


Ainsi est clos ce livre, débordant de paroles et d’images, ce livre de joie et de vie, de désespoir et de mort, — dans le silence de l’éternelle Paix.

Voilà comment on aperçoit, en lisant Pétrarque, quelques lignes générales de l’histoire morale qu’il a voulu conter. C’est assez sans doute pour reconnaître en lui un poète du premier rang pour l’élan lyrique, la splendeur descriptive, la richesse des images et la profonde émotion humaine. Un regard plus critique ferait apercevoir des défauts ; qui en doute ? Ils appartiennent presque tous au genre littéraire, et sont communs à bien des poètes amoureux qui relèvent de la lyrique courtoise. En revanche, une lecture moins sommaire ferait apercevoir bien d’autres merveilles. Nous avons passé sans les voir