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attaque soit dirigée contre le territoire ou les côtes de la Confédération. » Il a suffi d’imaginer la fausse attaque des avions français sur Nuremberg, pour que cette précaution ne fût nullement une garantie.

Contre les penchants et les entraînements d’un peuple pour qui la guerre a été, des siècles durant, une industrie nationale, qui, du naufrage où il est menacé de se perdre, songe d’abord à sauver son armée, il n’est point de précaution constitutionnelle qui vaille. Fragile rempart, chiffon de papier ! Changez les titres, les lois elles-mêmes, vous n’aurez pas changé les âmes. Que vient-on nous conter d’une révolution qui ferait des miracles ? Il n’y aurait de vraie révolution qu’une révolution psychologique. L’expérience et la prévoyance s’accordent pour nous conseiller de la croire impossible, et, en tout cas, de faire comme si elle l’était.

Plus on l’observe, plus la révolution allemande se réduit à des mouvements de surface : le dessous bouge peu. Et tout ce qui se passe ou se prépare, à notre vue, suit le fil que ni une guerre qui a été désastreuse, ni une révolution qui eût dû l’être, n’ont coupé. Ce fil n’a pas cessé d’être tendu d’une diversité presque infinie vers l’unité par une diversité de moins en moins grande ; des Allemagnes de jadis à l’Allemagne de 1815, de 1867, de 1871 ; des centaines de petits États féodaux, ecclésiastiques, municipaux, aux vingt-cinq États de l’Empire bismarckien, et de là aux huit républiques de M. Preuss, avec leurs accessoires. Dans le projet de Constitution du Dr Preuss, ce qui avait survécu, ce qui avait été conservé, par la Constitution de 1871, des libertés et des prérogatives, disons, — non sans quelque exagération, — de la souveraineté des États, disparaît. Conformément au traité du 23 novembre 1870, relatif à l’entrée de la Bavière dans l’Empire allemand, l’armée bavaroise formait en temps de paix une armée distincte de l’armée impériale. La Bavière gardait sa représentation diplomatique propre, le droit de légation actif et passif. Elle avait, au Bundesrath, au Conseil fédéral, la présidence du Comité ou de la Commission des Affaires étrangères, où devaient toujours figurer, avec son délégué, un délégué de la Saxe et un du Wurtemberg. Elle occupait en permanence un siège dans la Commission de l’armée. Qu’il y eût dans le Conseil fédéral vingt-cinq États représentés : 4 royaumes, 6 grands-duchés, 5 duchés, 7 principautés et 3 villes libres, c’étaient vingt-cinq types différents, vingt-cinq chances de variété d’intérêts et de divergence d’intentions, si ce n’est d’opposition de volontés. La combinaison du Dr Preuss, qui ramène à huit