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Cet ancien magister mérite un coup de baguette sur les doigts. Réconciliation ? Oubli ? Pardon ? Ici encore, les rôles sont étrangement intervertis. L’Allemagne n’a ni à oublier, ni à pardonner ; mais, au contraire, à faire oublier, à se faire pardonner. Quant à une réconciliation, pour en parler, même comme d’une possibilité, il est un siècle ou un demi-siècle trop tôt, dans les hypothèses les plus favorables. Il s’agit, pour l’instant, de faire la paix, une paix juste, une paix durable, mais qui ne sera juste et durable que si c’est une paix forte. C’est encore la nature de l’Allemagne, du peuple allemand, de l’homme allemand, qui nous y oblige. Il ne conçoit, ne connaît et ne comprend la justice que par la force. Les bornes que nous devons et que nous saurons y mettre sont en nous, elles ne sont pas en lui. Nous aimons donc à croire que si M. le maréchal Foch a consenti à supprimer la pénalité qu’il avait décidé d’infliger à l’Allemagne pour la non-exécution de ses engagements concernant la livraison du matériel de chemins de fer ; si, à la place de ces wagons et de ces locomotives en supplément, il a préféré réclamer des machines et instruments agricoles, il l’a fait pour donner satisfaction à des nécessités plus urgentes, du point de vue français, et pas plus ému des rodomontades de M. Erzberger qu’il n’avait été touché de ses jérémiades. Les autres clauses ajoutées le 16 janvier se rapportent à la situation des prisonniers russes encore retenus en Allemagne, que tous les récits dépeignent comme très misérable ; à la remise complète et immédiate de tous les sous-marins qui peuvent prendre la mer, » à la destruction ou au démontage de tous ceux « qui ne peuvent pas être livrés (et l’activité au moins singulière des arsenaux allemands prouve que la précaution n’est pas superflue) ; » à la « restitution du matériel enlevé dans les territoires belges et français ; » à la « mise de la flotte de commerce allemande sous le contrôle et sous le pavillon des puissances alliées et des États-Unis pendant la durée de l’armistice, » — « pour assurer le ravitaillement en vivres de l’Allemagne et du reste de l’Europe ; » — et le coup porté à l’orgueil germanique par cette dernière condition en peut être un peu amorti ; mais il est stipulé que « cet accord ne préjuge en rien la disposition finale de ces navires, » et l’Allemagne, dont la piraterie a tant de crimes à racheter, doit se dire que la phrase est à double tranchant. Enfin, la prolongation de l’armistice comporte une clause nouvelle d’occupation territoriale. « Le haut commandement allié se réserve dès à présent d’occuper, quand il le jugera convenable, à titre de nouvelles garanties, le secteur de la place