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blessure. On ne saurait exagérer l’importance de ce résultat tout à fait nouveau, en chirurgie.

Étant donnés les succès obtenus sur les animaux dans l’emploi de greffons d’artères mortes, il n’est guère douteux qu’on ne puisse également réalisera bref délai ce genre de greffes sur l’homme lui-même. Elles auront immédiatement une application fréquente d’une haute importance : la guérison des anévrismes aujourd’hui si fréquents et qui condamnaient jusqu’ici incurablement un grand nombre d’individus à mort. Que d’existences vont être sauvées par ce moyen ! Nombreuses sont les autres applications immédiates de la découverte. Jusqu’ici, lorsqu’on avait à réparer une perte importante de substance osseuse, par exemple chez un trépané, on opérait généralement la réparation in vivo au moyen d’un fragment d’os prélevé sur le sujet lui-même, par autoplastie, comme on dit à la Faculté. Combien il sera plus facile de faire la greffe au moyen d’un fragment d’os de veau ou de chien conservé dans l’alcool et dont le chirurgien aura une provision en réserve dans l’armoire de la salle d’opération ! De même pour les pertes de substances du nez, pour la rhinoplastie, si nécessaire à tant de mutilés de la guerre, et que longtemps avant celle-ci, certaines maladies comme le lupus rendaient nécessaire. Dans tous ces domaines, et dans d’autres encore, la voie est maintenant ouverte et on aperçoit, sans qu’il soit besoin d’y insister, toutes les conséquences pratiques immédiates des suggestifs travaux de Nageotte et Sencert.

Mais si nous franchissons par la pensée quelques étapes encore, si, devançant un peu les certitudes pour atteindre les probabilités, nous en recherchons les conséquences plus lointaines, les perspectives les plus étonnantes et les mieux faites pour émouvoir les cœurs vont s’offrir à nous !

Ces perspectives, découlent à la fois de ce qui a été dit ci-dessus et d’un fait biologique remarquable et tout à fait imprévu qui vient d’être présenté à l’Académie des Sciences par MM. Nageotte et Sencert.

Voici. En observant histologiquement et microscopiquement les fragments d’artères carotides mortes greffées par eux sur des chiens, ceux-ci ayant été abattus quelque temps après, ils ont constaté et pu suivre dans toutes les phases le phénomène suivant. La paroi artérielle est, comme on sait, formée de plusieurs tuniques superposées ; parmi celles-ci, la tunique moyenne est constituée dans l’artère vivante par des cellules particulières, appelées fibres musculaires lisses et qui sont séparées par des lames élastiques fines et