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si l’on peut s’exprimer ainsi, ce coin des « coulisses » du formidable drame.


I

Pour comprendre où en était le Service automobile à la fin du mois de février 1916, et de quels moyens il disposait alors, il est nécessaire de remonter un peu plus haut et de résumer, brièvement, ses divers développements depuis le premier jour de la mobilisation.

On a dit parfois que le Service automobile est une « création » de la guerre. Prise dans son sens absolu, cette expression ne serait pas exacte. Le Service automobile était créé bien avant la guerre, et son organisation avait même été tracée dans ses moindres détails, avec beaucoup plus de précision qu’on ne le suppose généralement. Toutefois, il n’existait, pour ainsi parler, qu’à l’état de projet. S’il était permis de le comparer à un être vivant, on pourrait dire qu’il était « conçu, » qu’il n’était pas « né » : ses éléments, cachés et dispersés aux quatre coins de la France, n’avaient jamais été rassemblés au grand jour. On pourrait dire encore, en se servant d’une autre image : c’était, non pas un corps sans âme, mais, au contraire, une âme sans corps ! Enfin, surtout, personne, même parmi ceux qui avaient médité longuement sur ses destinées, n’avait pu prévoir l’importance qu’il devait prendre au cours de cette guerre.

La mobilisation du Service automobile avait été préparée, en temps de paix, par l’état-major de l’armée, notamment par la section automobile du quatrième bureau, qui était spécialisée dans l’étude des questions concernant l’emploi des véhicules automobiles dans la guerre[1].

L’Etat ne possédant pour ainsi dire pas de matériel automobile, on comptait, pour satisfaire aux besoins militaires, sur la réquisition des voitures appartenant à des particuliers. Ces voitures étaient connues au moyen d’un recensement, qui avait lieu au début de chaque année : le recensement était suivi d’un classement, sur lequel était fondé un plan de réquisition.

Pour les voitures de tourisme, il n’y avait aucune difficulté :

  1. Instruction provisoire sur l’utilisation en temps de guerre des véhicules automobiles, 11 avril 1913. — Instruction sur la réquisition des voitures automobiles pour les services de l’armée, 21 mars 1914.