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En résumé, si l’on réfléchit aux conditions militaires que le prochain traité de paix devrait imposer à l’Allemagne, il semble qu’il soit imprudent d’avoir trop grande confiance dans l’efficacité des mesures visant à limiter les armements, car ces mesures peuvent être éludées ou échapper au contrôle.

La véritable garantie de la paix future consistera dans la prolongation de l’alliance des nations qui auront établi l’ordre de choses nouveau.

Il appartiendra à ces nations, après avoir fixé, dans le prochain Congrès, le statut de l’Europe, de prendre d’un commun accord les mesures militaires nécessaires pour imposer au monde le respect de ce statut. Si la paix qu’elles vont dicter est équitable, si l’emploi qu’elles feront de leur force est profitable au monde entier, le groupement des Puissances associées appellera à lui progressivement la collaboration des nations civilisées : il tendra ainsi constamment vers la réalisation du type idéal fixé par le président Wilson.

Une des premières mesures qu’entraîne la fondation d’une Société des Nations est la formation d’une armée commune. Aussi longtemps que la Société le jugera nécessaire pour la paix du monde, les troupes de cette armée commune monteront la garde sur les rives du Rhin.

Cela est indispensable. Ayons le courage de regarder en face la réalité et de la voir telle qu’elle est. L’Allemagne sort de la guerre vaincue, appauvrie en hommes, diminuée en richesses et en ressources industrielles, mais unifiée, plus qu’elle ne l’a jamais été, et géographiquement agrandie. Le temps seul pourra nous dire si elle a étouffé chez elle le militarisme, c’est-à-dire l’esprit de conquête. Elle reste un danger pour la paix.

Mais l’ambition d’un peuple, quel qu’il soit, ne peut rien contre la volonté de tous les peuples. Il faut que cette volonté commune des peuples prenne corps et qu’elle agisse, dès demain, pour consolider les résultats acquis, pour coordonner la transformation de l’Europe, et imposer la paix au monde. Nous devons fonder la Sainte-Alliance des peuples libres.


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