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DES CONDITIONS MILITAIRES
DE LA PAIX

Nous avons vaincu.

Nous venons de vivre quelques rapides journées d’enthousiasme où, sous l’empire d’une immense émotion, l’âme du soldat s’ouvrait sans réserve pour ses chefs, où tout ce qu’il a été semé, pendant cette longue guerre, de confiance et d’estime mutuelles entre les combattants, semblait s’épanouir au grand soleil. Gardons ces souvenirs précieux pour plus tard. Réfléchissons sur ce que nous avons vu pendant quatre ans de lutte et tâchons d’en tirer quelques conclusions.

Il ne peut en être de plus urgentes que celles qui concernent le traité de paix lui-même.

Nous avons combattu pour établir une paix durable. Nous ne sommes pas assez chimériques pour compter que du jour de notre victoire datera pour l’humanité une ère de paix perpétuelle et d’universelle harmonie ; mais nous voulons que la paix de demain soit entourée de garanties effectives, qu’elle repose sur une base plus solide que la lassitude des peuples. Aucune idée ne s’est gravée plus profondément dans l’esprit de la masse des combattants. Il y a bien peu de jours encore, quand nous nous demandions, non sans anxiété, si les discussions de paix qui s’agitaient au-dessus de nos têtes n’allaient pas amollir la volonté de vaincre de nos soldats, leur bon sens d’âmes simples nous répondait de lui-même : « Il faut bien en mettre encore un coup, pour que la guerre ne recommence ni dans trois mois, ni dans vingt ans… » Ils en ont mis jusqu’au bout. Dans les conditions les plus dures et parfois les