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A l’heure de minuit, Tituti exprime en vers pittoresques l’impression de tranquillité qu’il ressent :


Tout est calme, endormi, clos, le silence règne,
On n’entend que le bruit des pattes de l’araigne
Tissant sa toile au coin de quelque plafond noir.


Puis Victor Hugo prête à son personnage, sous deux formes différentes, une idée qu’il a souvent reprise.


L’homme joue en riant le grand drame Douleur :
Dieu, l’auteur de la pièce, a Satan pour souffleur.


ou :


O Comédie
Spectacle sombre ! On sent Satan dans la coulisse,
Et Dieu, le machiniste, au troisième dessous.


Philosophe, Tituti s’exprime avec dédain sur la vanité de la philosophie.


<poem< Philosophes, savants aux noirs calculs, poètes, Traducteurs des bruits sourds et des voix inquiètes, Sombres initiés de la nuit et du vent, Vous parlez au hasard, en soupant, en buvant, Parmi les pots, au choc des rires et des verres, De Dieu, des morts, du ciel, des mystères sévères, Vous me faites l’effet de prêtres d’Isis gris. </poem>


Il sait aussi la vanité de l’amour :


Tout finit, — crois-tu donc être éternel, jeune homme ?
Crois-tu sans fin l’amour où ton cœur est dévot ?
Tu fais tous les matins, par Madame Prévôt,
Envoyer un bouquet aux yeux que ton cœur aime.
Cette habitude, étant une fleur elle-même,
Se fanera. Demain peut-être, soyons francs,
Tu te diras pensif : mais diable, c’est dix francs !
Et tu sentiras, triste, au fond de ta cervelle,
Deux pièces de cent sous peser plus que ta belle !


Il sait enfin la vanité de la gloire. Il a fréquenté des poètes et il a des lettres. Il regarde un portrait de Corneille, et la