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dans ces lettres, la merveilleuse activité, le parfait mérite et la grande connaissance du métier des armes dont il venait de donner, dans la, présente guerre, un témoignage si éclatant. De fait, il est peu de citations militaires plus glorieuses que cette lettre où le Roi ne précisait pas seulement l’action que Castelnau avait « nouvellement faite aux Dunes de Dunkerque, » mais relatait en même temps l’aide, que cet officier avait apportée au siège de cette ville « et en la prise du fort Léon. »

La seule chose que le nouveau maréchal trouva à dire à M. de Mazarin, quand ce ministre vint à son chevet et lui fit remise des lettres et du bâton que Louis XIV lui envoyait, est « qu’il lui plaise remercier le Roi pour lui de l’honneur qu’il lui faisait » et de lui témoigner, en même temps, « qu’il n’avait nul regret à la vie puisqu’il mourait pour l’accroissement de sa gloire » et l’affermissement de son autorité. Le cardinal, à ces mots empreints d’un si grand stoïcisme et d’une si parfaite et si sublime résignation, ne put s’empêcher de mêler ses larmes à celles de tous les officiers de l’armée des Flandres qui assistaient à cet entretien.

Celui-ci fut bien le dernier de tous ceux, si édifiants, que le premier ministre et le nouveau maréchal avaient eus ensemble, depuis ce long mois d’un temps où le deuil et la gloire, en achevant de s’unir dans la mort, témoignaient de la passion de servir qui caractérisa toujours, en sa carrière brève et pleine d’exploits, le maréchal de Castelnau.

Et pour ce nom de Castelnau, ce nom fameux, symbole d’honneur militaire, expression de toutes ces « grandes vertus de capitaine » dont Saint-Simon a parlé à propos de Catinat, c’est lui, par un retour de la destinée, que nous avons vu, dans la présente guerre, porté si vaillamment par le commandant en chef de l’armée de Lorraine, reparaître par deux fuis, aussi fier qu’aux Dunes ou à Nordlingen, à Nancy et devant Verdun.


EDMOND PILON.