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finir en héros. Nommé mestre de camp d’un régiment de cavalerie, il reçut, en 1672, quatorze ans après la mort du lieutenant-général et durant la guerre du Hollande, une blessure si grave qu’il n’eut que le temps de se faire porter à Utrecht, en plein hiver, pour y expirer. Ce Michel, de son côté, laissa veuve avec trois filles Louise-Marie Foucault de Daugnon, qui était vraiment douce et charmante et que Mme de Sévigné proclame « blanche et fraîche femme » autant que jolie (Lettre du 5 janvier 1674). Une telle postérité était, de tous points, bien digne du garçon entreprenant, fier et brave que nous vîmes jadis, de sa terre tourangelle, venir à Paris, à dos, comme Bayard, d’un « bas petit roussin » et qui, comme Bayard, ne cessa jamais d’être, durant sa vie, sans peur et sans reproche.


IV. — JACQUES DE CASTELNAU, LIEUTENANT DE TURENNE EN FLANDRE. SON ACTION AUX DUNES DE DUNKERQUE ET AU FORT LÉON

Si l’on voulait donner à de telles biographies le lourdes contes et faire en sorte que Perrault s’y mêlât à Plutarque, il faudrait demander aux Mémoires de Grammont un peu de cet accent à la fois martial et tendre avec lequel Hamilton nous parle des guerres. « En ce temps-là, dit en effet cet auteur, comme s’il allait nous narrer la Belle au Bois, de grands hommes commandaient de petites armées, et ces armées faisaient de grandes choses. » Ces grandes choses (nous l’avons vu au cours de ces pages), c’était la France victorieuse sur la Somme, puissante en Flandre et sur le Rhin : c’étaient aussi des actions hardies et fortes comme places conquises et batailles gagnées : Corbie, Fribourg ou Nordlingen.

Cette action de Nordlingen a été vantée par Bossuet dans son Oraison de Louis II de Bourbon et Corneille, dans l’avertissement de Rodogune adressé au même prince, en a parlé. « Thionville, Philippsbourg et Nordlingen, écrit d’un cœur ardent le poète du Cid, étaient des lieux funestes pour la France… Et ces mêmes lieux, dont le souvenir lui arrachait des soupirs, et des gémissements, sont devenus les éclatantes marques de sa nouvelle félicité, les dignes occasions de ses feux de joie et les glorieux sujets des actions de grâces qu’elles a rendues au ciel. » Dans le cours de vies fécondes, autant que le sont celles d’un Condé, d’un Turenne ou d’un Castelnau, d’un