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Danton, un Carnot, un Merlin achèvent l’œuvre d’un Richelieu et Napoléon la consomme.

Parce que réoccupée par les soldats de la Nation qu’a, en 1792, appelés le vœu des Rhénans, offerte au Directoire par ses habitants, réunie au milieu des cris de joie par les Consuls, réadmise dans la communauté française, en partageant la force, la prospérité et la gloire, ayant crié de joie à ses victoires et de douleur à ses revers, la Rhénanie a été arrachée à la France en 1814 et mise en 1815 sous un joug qu’elle ne cessa point soixante ans de tenir pour « étranger, » elle est restée, jusqu’à des années encore proches, l’objet de nos revendications secrètement ou ouvertement encouragées par les siennes propres.

Voilà ce qu’aucun Français ne saurait ignorer. Si nul n’est censé ignorer la Loi, nul ne devrait être censé ignorer l’Histoire.

Qu’on choisisse pour faire valoir ses droits telle forme ou telle autre, c’est question à débattre. Mais ce qui serait odieux c’est de les négliger pour les avoir ignorés et, par un silence criminel, de les laisser, en une grande et solennelle occasion, purement et simplement périmer. Trente générations de Français se lèvent pour nous les rappeler et qui sait si les générations futures ne se lèveraient pas à leur tour, au cas où un si scandaleux oubli se traduirait vraiment dans les faits, — pour nous reprocher d’avoir laissé prescrire le droit de notre peuple et sombrer l’une de nos plus constantes traditions nationales ?


Louis MADELIN.