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les prix, devait avoir pour le commerce les plus heureux effets ; par la convention de 1805 avec les princes de la rive droite, ces péages incommodes étaient remplacés par douze bureaux d’octroi, — six sur chaque rive. La réparation des digues, la navigation facilitée, des ports francs créés à Cologne en 1802, à Mayence en 1805, l’agrandissement du port de Mayence, ont comme résultat une circulation commerciale sans précédent : le seul produit des taxes sur les entrées du port de Cologne va s’élever de 66 000 francs en 1803, à 114 000 en 1806, à 1 700 000 en 1808.

Ce qui partout favorisait la richesse, c’était la prompte exécution des travaux publics. J’ai jadis étudié en détail l’administration d’un préfet de l’Empire, le baron de Tournon, dans le département du Tibre : ce qui me frappait, c’était la rapidité avec laquelle en moins de trois ans, — de 1810 à 1813, — il avait conçu, fait accepter, exécuté et souvent terminé les tâches devant lesquelles pendant des siècles le gouvernement précédent était resté comme paralysé. Un Jean-Bon Saint-André, nommé en 1802, n’attend pas un an pour mettre la pioche où il faut : ce rude bonhomme ne s’empêtre point dans la paperasserie ; examinés sans retard, les rapports ne se multiplient point ; à peine s’embarrasse-t-il des règles de comptabilité. On le verra sans autorisation engager des fonds dans la confection de la magnifique route de Coblence à Mayence. L’Empereur feint la colère ; croyez qu’au fond de lui, il donne raison au préfet qui consterne « les finances. » : « Allons, M. Jean-Bon a voulu faire son petit Simplon. » Napoléon aime que chacun fasse « son petit Simplon. »

Commencée en 1802, la route est terminée en 1805, et il a fallu en maints endroits tailler dans le roc pour que s’ouvre au commerce, trois ans après le premier coup de pioche, « l’une des plus belles chaussées de l’Europe. » Les routes de Paris à Mayence, de Chalon-sur-Saône en Bingen, de Bâle à Nimègue sont faites avec des tronçons de routes ; toutes les autres, laissées dans l’état le plus fâcheux avant 1802, sont remises à neuf. Le Rhin est rattaché par tout un réseau à la région lyonnaise, à la région parisienne, à la région flamande, à la Hollande, la Suisse. Les canaux se multiplient ; la Meuse est jointe, au Rhin de Venloo à Rheinberg par Gueldre et Clostercamp ; Jean-Bon entend rendre navigable la Nahe et le Glan, améliorer le canal