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Nous revoyons l’âpre exil de tous ces Français qu’un ennemi sans pitié a torturés dans ses geôles, et qui par milliers ont succombé à d’abominables traitements, loin de tout ce qu’ils aimaient. Ceux qui reviennent, qu’ils nous fassent le récit de l’atroce captivité, qu’ils établissent le compte des coups reçus, la liste des humiliations dévorées, afin que le souvenir s’en perpétue à travers les générations qui ont le devoir de ne pas oublier !

Et nous songeons à la détresse des populations envahies, au martyre des otages, aux meurtrissures de notre sol, à la dévastation de nos cités et de nos villages, à la ruine de nos monuments, joyaux du passé que les siècles et les guerres avaient respectés. Quelle dette nous avons contractée envers toutes ces victimes d’une sauvagerie que les âges barbares n’avaient pas connue !

Toutes nos dettes, nous sommes heureux de les reconnaître. Celle-ci d’abord. Aux premiers jours de la guerre, un geste a été décisif, celui du roi des Belges se dressant, lui le souverain d’un pays neutre, le chef d’un petit peuple, devant le colosse germanique. En retardant la marche de l’invasion, le roi Albert a changé le cours de l’histoire. Honneur à lui !

A sa décision chevaleresque a répondu la loyauté anglaise. Jamais nous ne saurons trop admirer, le patient effort qui a changé la « méprisable petite armée » en une armée splendide, devant laquelle ont fui ceux qui s’étaient trop pressés de la dédaigner. Courageusement l’Italie s’est rangée à nos côtés, à l’instant où l’exemple de la Belgique pouvait lui faire craindre la dévastation de ses plus riches provinces. Et l’Amérique, en prenant parti pour nous et compensant par son immense apport la défection russe, a scellé un nouveau pacte où les descendants de ceux qui combattirent jadis pour le même idéal se sont retrouvés frères d’armes. Alliances nées de la guerre, qui devront lui survivre. Créées