Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 48.djvu/475

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le gouvernement allemand « attend les propositions. » Comme s’il s’agissait de « propositions, » et non de « conditions ! » Comme si on lui avait offert, sans qu’il eût demandé! « Les propositions » non pas d’un armistice réglé selon que l’entendront les Puissances victorieuses qui l’accorderaient; mais de l’armistice, — évidemment bénin, — « qui sera le premier pas vers une paix équitable; » vers la paix « telle que le Président Wilson l’a décrite dans ses proclamations; » et l’on se flatte bien de n’être jamais à court de chicanes : tant que ce ne sera pas la paix que l’Allemagne veut, ce ne sera point la paix juste, celle que le Président a décrite ; l’image ne sera point ressemblante; on ne la reconnaîtra point. On traînera, on se fera traîner, et l’on ne désespérera pas d’arracher à la lassitude ce que la force n’a pas donné.

Heureusement, le gouvernement allemand attend toujours : quelque dédain qu’ait le « riche génie germanique » pour la pauvreté du cerveau latin, qui est à cloisons, à casiers, à compartiments, cependant il ne peut lui refuser d’être clair. Or, voici qui est latin, qui est français, et qui est clair. Il y a la paix, et il y a l’armistice. La paix est une chose, et l’armistice en est une autre. L’heure venue, les gouvernements, par leurs délégués, causeront de la paix, état durable, consolidé. L’armistice, suspension d’armes, transition, état provisoire, regarde les militaires. Seulement, du coup, la suspension d’armes ne peut être que la déposition des armes. Nous ne pouvons permettre qu’on sorte de l’armistice pour rentrer, rafraîchi et réconforte, dans la guerre. Au bout de ce provisoire, il’ n’y a qu’un définitif : la paix, une paix juste, celle du Président Wilson, mais une paix sûre, la sienne et la nôtre. Nous n’avons à faire, quant à nous, ni propositions de paix, ni propositions d’armistice. Si l’Allemagne a à en faire, comme elle en a témoigné le dessein, il existe pour cela un protocole, constamment suivi, et qu’elle n’ignore pas : un drapeau blanc et des parlementaires. De tout récents exemples, tout près d’elle, lui rappellent comment on procède. Ses trois séides dans la Quadruple-Alliance, la Bulgarie, la Turquie, l’Autriche-Hongrie, se sont, l’un après l’autre, exécutés. Qu’elle fasse comme eux : nous n’avons pas de motifs de la traiter autrement que nous ne les avons traités. C’est nous qui attendons; et nous la ferons d’autant moins languir que, sa démarche étant annoncée, les gouvernements de l’Entente ont pu se mettre, par avance, d’accord avec leurs « conseillers militaires » sur les conditions, — qui sont, avant tout, pour l’armistice, si elle en veut un, des précautions, — à lui imposer. Pas