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s’engageait alors entre le système anglo-saxon du monde, tel que l’a défini le président Wilson et le système teuton.

Pour n’être pas encore vidée, la querelle reste identique : il faut, a dit le Kaiser, que l’un des deux succombe. La conviction qu’il en est fatalement ainsi s’impose a quiconque s’applique à discerner, dans les dédales de ses cheminements, les directives de la politique allemande.


I

Le fait initial de la phase actuelle et encore inachevée de la grande guerre, est la résolution de paix volée par les deux tiers du Reichstag le 19 juillet 1917. Il importe d’en rappeler le texte et les origines politiques, avant de suivre l’application qui en a été faite par le gouvernement impérial.

« En repoussant l’idée d’accroissement des territoires opéré par la contrainte, l’assemblée, disait cette résolution, poursuit une paix à l’amiable, aboutissant à la réconciliation durable des peuples. Les actes de violence politiques, économiques et financiers sont incompatibles avec une pareille paix. Le Reichstag repousse également tous les plans tendant à un boycottage et à des interdictions économiques après la guerre. Seule, une paix économique avec la liberté des mers, après la cessation des hostilités, permettra aux peuples de vivre ensemble dans des relations économiques durables. »

Telle était la réponse faite officiellement par la majorité parlementaire au programme de paix « sans annexions ni indemnités » que venaient de formuler les promoteurs de la trop fameuse conférence socialiste internationale de Stockholm.

On pouvait croire, à s’en tenir aux apparences, qu’il y avait suffisante identité d’aspirations entre les auteurs de id motion et les inspirateurs de Stockholm pour que des conversations utiles dussent s’engager à bref délai, avec la complicité active de toutes les forces cosmopolites de l’univers. De fait, après le court interrègne de M. Michaëlis, le Reichstag manœuvra de manière que la chancellerie fût confiée à un catholique bavarois de marque, M. de Herlling, lequel se fit assister d’un suppléant pris parmi les radicaux, M. de Payer, et du diplomate le plus expert et le plus conciliant dont dispose l’Allemagne, M. de Kühlmann. À ce trio de choix le chef des socialistes