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naissance du monde… » Et cet appel à l’orgueil de la Germanie se termine, plus modestement, par un appel à sa résignation : « Il nous faut donc consentir aux plus formidables sacrifiées… Des privations ? La soupe aux pommes de terre est aussi succulente que le rôti, quand on sait l’assaisonner d’une bonne plaisanterie et d’un rire joyeux… » (Kœlnische Zeitung. 5 septembre 1916.)

Le succès foudroyant de la campagne de Roumanie réalise ce que l’éloquence des journalistes eût été incapable d’obtenir. Une fois de plus, l’Allemagne s’enivre de gloire militaire.

Les fanfares de victoire éclatent dès la chute de Tutracam. Ensuite, c’est l’invasion de la « Dobroudja. « Sous la direction de chefs militaires habiles et méthodiques, enflammés de rancunes profondes contre des adversaires perfides, les compagnons d’armes allemands, bulgares et turcs volent de victoire en victoire. Nous sommes revenus aux jours glorieux où nous traversions en tempête la Belgique et la Serbie. Des tâches nouvelles s’offrent à la vaillance de nos troupes ; elles s’annoncent difficiles, mais ce brillant début garantit un brillant avenir. » (Neue Badische Laudeszeitung, 11 septembre.) Léger mouvement de déception, lorsque l’Empereur télégraphie à l’Impératrice la nouvelle d’une victoire décisive. Tout le monde croit à un nouveau Sedan, voit la Roumanie définitivement écrasée, la paix conclue. Il faut que la presse commente laborieusement le mot décisif : « Quand nous parlons de victoire décisive, il s’agit d’une victoire qui a empêché l’ennemi de poursuivre les opérations qu’il projetait, et qui a modifié, d’une façon décisive, la situation sur un des théâtres de la guerre. » (Kœlnische Volkszeitung, 19 septembre.) Mais le cours des victoires ne se ralentit pas. Des communiqués flamboyants célèbrent la prise de Silistria, la victoire de Hermannstadt, la chute de Constanza, le passage du Danube. A l’annonce de la prise de Bucarest, transports d’allégresse : « La capitale de la Roumanie est tombée ; et la Russie, la grande, la sainte, l’invincible Russie, en mettant toute sa puissance militaire au service de la Roumanie, n’a pu empêcher cette catastrophe !… Bucarest est à nous et Constantinople est à jamais inaccessible au Tsar.. » (Kœhnische Volkszeitung, 7 décembre.)

Certes, la grandeur et la soudaineté des opérations étaient propres à assouvir les rancunes de d’Allemagne. Cependant, au