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GUILLAUME À SA TOUR MONTE.


L’Aigle a dit chaque jour : « Sire, ôtez ce drap gris :
Ses plis me serrent ! » —
« Je l’ôterai demain pour entrer à Paris. »
Quatre ans passèrent.

Et l’Aigle attend toujours sous sa housse de drap.
On se demande
Jusques à quand, sous cette housse, elle attendra,
L’Aigle allemande !

Et, ce soir, cependant qu’au loin, dans la fureur,
Le sort se règle,
Ils sont là, sur la tour, tous les trois, l’Empereur,
Le Clown, et l’Aigle.

L’Empereur dit, en se drapant, car le tableau
Est historique :
« J’aurai l’Europe avant qu’elle ait traversé l’eau,
Leur Amérique ! »

Le Clown dit : « J’écrirai ces choses, la beauté
De cette attente !
Ô romantique tour ! ô nuit ! Sa Majesté
Sera contente ! »

L’Aigle dit : « Demain soir ! On fera, demain soir,
Tomber mon voile !
Demain soir, je vais battre enfin sous ton voussoir,
Arc de l’Étoile ! »

Le canon tonne au loin. — « C’est la victoire ! » dit
Le Clown prophète.
Ils attendent. La nuit passe. L’aube grandit.-
Pas d’estafette.