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Alors Charles Ier se tourne vers son armée et sa marine « fidèles. » Fidèles comme ses peuples. Que de fidélités! et comme on éprouve le besoin de les constater toutes! Mais la fidèle armée continue de déserter et la fidèle marine continue de se mutiner.

Si maintenant, comme il est vraisemblable, et même certain, à de nombreux indices, le Manifeste était inspiré, en outre, par des considérations d’ordre extérieur, la réponse du Président Wilson à la note du gouvernement austro-hongrois a dû dissiper les espérances qu’on avait fondées sur ce camouflage. « Trop tard, dit le Président. Depuis le message du 18 janvier 1918, il est survenu certains événements de la plus haute importance... Les Tchéco-Slovaques, les Yougoslaves, existent nationalement et internationalement. Ils ont des gouvernements reconnus. Ce sera à eux-mêmes de disposer, selon la formule, librement, souverainement, d’eux-mêmes. » Trop tard a toujours été la loi sous laquelle a vécu l’Autriche. Elle en mourra.

Regardons en silence, mais faisons nos comptes. Hindenburg, comme le landgrave de la légende, exhortait naguère ses Allemands à être durs. Nous, soyons sages et raisonnables, mais ne soyons pas faibles. Nous n’avons pas fléchi à l’heure du péril : sachons vouloir toute la victoire. Douleurs, misères et ruines, incendies et pillages, il faut que tout ce qui doit être payé se paie intégralement. Il faut que ce que nous avons vu, ceux de nos fils qui resteront et les fils de nos fils ne puissent pas le revoir. Il faut que la patrie libérée, purifiée, soit inviolable. Laissons la force achever d’accomplir l’œuvre de la justice.


CHARLES BENOIST.

Le Directeur-Gérant : RENE DOUMIC.