Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 48.djvu/203

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

capital, n’était pas expressément stipulé en or, crurent que le service ne s’en ferait plus qu’en argent, c’est-à-dire en un métal déprécié. Quant aux obligations dont le service était promis en or, les détenteurs se demandèrent si le débiteur serait en état de faire honneur à ses engagements et s’il serait en mesure de se procurer, sans sacrifices excessifs, le métal jaune au moyen duquel il devait s’acquitter. Tel était alors l’état de l’opinion au sujet des deux métaux.


V. — LA QUESTION DE L’OR. CONCLUSION

Il convient d’avoir ces souvenirs présents à la mémoire pour essayer de prévoir ce que sera la situation monétaire au lendemain de la paix. Il est probable que l’excédent des monnaies d’argent mis en circulation pendant la guerre pèsera alors sur les marchés et aura une tendance à disparaître, c’est-à-dire à se transformer en lingots. De là une baisse inévitable du métal. Il paraît donc sage d’arrêter les achats actuels, effectué à des cours très supérieurs à la moyenne des vingt dernières années qui avaient précédé la guerre. Cette opération a le double inconvénient de saturer notre circulation métallique de pièces divisionnaires et de la faire moyennant une dépense en or de plus en plus élevée. Les partisans de la frappe continue de ces monnaies allèguent qu’il est bon de ne pas être au régime exclusif du papier et de montrer au public une quantité appréciable d’espèces métalliques. Nous leur répondrons que cette quantité existe, mais que la majeure partie se cache ; dès lors il est inutile d’essayer de combler des vides qui se creusent régulièrement.

Logiquement, nous ne devrions pas avoir besoin de beaucoup plus d’argent divisionnaire qu’avant 1914, puisque les billets de 5, 10 et 20 francs sont en bien plus grand nombre que ne l’étaient les écus et les napoléons qui circulaient avant la guerre. Ne cédons ni à des demandes irréfléchies ni à ce que j’appellerai une fausse sentimentalité monétaire. Nous avons beaucoup d’or, dont une grande partie est à la Banque : il gage notre circulation de billets. S’il y a lieu d’augmenter encore nos approvisionnements métalliques, c’est en métal jaune et non en métal blanc qu’il convient de le faire. Au lendemain de la paix, les grandes nations du monde ne changeront pas la