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bulletins de chaque État sont déposés dans l’urne, au moment du vote, par un seul délégué de cet Etat.

Supposons maintenant que l’article 9 de la Constitution soit supprimé et que des membres du Reichstag puissent devenir plénipotentiaires de leurs pays respectifs au Bundesrath, le mandat impératif qui entravera leur droit de vote restera le même. Si par exemple Scheidemann et Sudekum devenaient, comme secrétaires d’Etat de l’empire, membres du Conseil fédéral, ils voteraient sur ordre, comme leurs collègues, et ce serait le président du conseil prussien qui disposerait de leurs bulletins de vote. On voit par-là que la réforme « démocratique » dont le Reichstag semble d’avance se réjouir si bruyamment, ne sera qu’un trompe-l’œil, qu’un attrape-nigauds pour les Alliés qui pourraient être tentés d’y découvrir une transformation sérieuse des institutions parlementaires de l’empire germanique.


Mais il y a mieux. L’empire n’a qu’un ministre responsable : le chancelier. Les secrétaires d’Etat qui l’assistent ne sont que des chefs de services qui lui restent, en tout et pour tout, subordonnés. De même que le chancelier parle toujours au nom des gouvernements confédérés (im Namen der verbändeten Regierungen), les secrétaires d’Etat défendent les projets de lois devant le Reichstag au nom du chancelier (in Namen des Herrn Reidiskanzlers). La nomination de députés aux postes de secrétaires d’État n’aurait donc aucune signification au point de vue de la politique générale. Conservateurs, centristes, socialistes ou démocrates, les parlementaires « fonctionarisés » resteraient les simples exécuteurs des volontés de leur chef.

Il est vrai que Bismarck, dont le programme centralisateur s’affirmait en toute occasion, affectait d’appeler les secrétaires d’Etat « ministres de l’Empire ; » mais le Reichstag n’accepta jamais cette qualification anticonstitutionnelle.

La situation changerait si, d’aventure, la Constitution était modifiée de telle façon que la création d’un véritable ministère devînt possible. Mais là on se buterait à une nouvelle difficulté, celle-là presque insurmontable. Du jour où les secrétariats d’État seraient transformés en ministères autonomes, les princes confédérés dont les ministres devraient, dans le gouvernement de l’Empire, défendre les intérêts souvent