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perd, il faut encore augmenter le « shipping » de l’Entente par rapport à ce qu’il est actuellement. M. Borel, dans le discours qu’il a prononcé à la Chambre des députés le 6 septembre dernier, a fait ressortir que le programme d’importation de la France était de 7 millions de tonnes en chiffres ronds contre 6 millions l’année passée et 4 442 000 tonnes en 1916. La demande pour l’ensemble des besoins alliés s’élève à 27 millions de tonnes contre 22 millions l’année dernière : ils sont donc en augmentation sensible, ce qui ne surprendra personne, puisqu’il s’agit d’entretenir et de ravitailler une nouvelle armée sur le sol français. La question de la marine marchande passe ainsi au premier plan de nos préoccupations nationales ; la vie des peuples de l’Entente et le sort de leurs armées en dépendent.


En définitive, la campagne sous-marine nous oblige à tenir un nouveau front exigeant l’armement de 5 000 navires et 3 000 avions qui sont montés par plusieurs centaines de mille hommes. Elle nous entraîne à des consommations considérables de charbon et d’acier. Elle anéantit de grandes richesses que nos ennemis évaluaient dernièrement à 50 milliards. Elle détourne des fabrications militaires une véritable armée d’ouvriers travaillant sur les cales de constructions. Les chiffres suivants permettent d’apprécier son importance : il y a un an, 45 000 hommes seulement étaient employés dans les chantiers navals des Etats-Unis. Aujourd’hui, ces chantiers occupent 300 000 mécaniciens et autres ouvriers pour la seule construction des coques de navires, et 250 000 pour la construction des machines, des chaudières, des cabestans et treuils et autres appareils accessoires. C’est une nouvelle guerre d’usure à laquelle il nous faut faire face. Nous y sommes préparés et les Alliés disposent de ressources suffisantes pour alimenter leurs armées tout en payant aux sous-marins allemands le lourd tribut qu’ils nous imposent.

Raison de plus pour accentuer notre effort. C’est lorsqu’il voit poindre l’aurore de la victoire que le soldat combat avec le plus d’ardeur. Aujourd’hui, nous pouvons l’écrire en toute conscience ; le péril sous-marin est conjuré. Nous n’avons plus à craindre ni la disette des importations, ni la rupture de nos