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sur elle la bénédiction du Souverain Pontife, l’Allemagne, par l’entremise d’un gentilhomme bavarois de ses agents, dont elle se piquait d’exploiter les alliances, a esquissé vers la Belgique un geste de séduction qui par lui-même est un outrage; plus odieux encore, par le prix qu’elle avait l’audace d’y mettre. C’était à la Belgique, qui ne recevait rien, en compensation de ses souffrances et de ses pertes, de donner « des garanties » de toute sorte, politiques, militaires, coloniales, économiques : à peine si on ne lui appliquait pas la conclusion extrême de M. de Payer, et si on la dispensait de verser à ses bourreaux une indemnité, la seule chose qu’à leur avis ils ne lui auraient pas volée ! Comme toujours, l’Allemagne s’est trompée sur le moment, sur le milieu et sur la personne. Elle n’a pas appris à lire dans les yeux du roi-chevalier. Au reste, l’opération était peut-être plus stratégique encore que diplomatique, et c’est, en notre faveur, un excellent présage de plus.

Pour nous, sollicités par le comte Burian, deux attitudes étaient possibles. Nous pouvions ou nous taire, — ce que les maîtres eussent conseillé, — ou répondre en mettant les points sur les i, et il y en a au moins un dans chacun des trois mois qui, répétés pour la centième fois, doivent être toute notre réponse : Restitutions, réparations, garanties. C’est à peu près ce que nous avons fait. Nous avons répondu, mais de haut et de loin, en rompant tout de suite, en déclinant une conversation qui n’eût été qu’un bavardage. Le président Wilson a frappé sa réplique de son empreinte ferme et robuste; celle de M. Balfour s’est ornée d’une dissertation aussi vigoureuse qu’élégante; M. Clemenceau a donné à la sienne les ailes de la Marseillaise. Foch demeure, d’un consentement unanime, notre premier plénipotentiaire, et nos héroïques soldats « les bons ambassadeurs de la République. »


CHARLES BENOIST.

Le Directeur-Gérant : RENE DOUMIC.