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par des améliorations successives ; il n’en était pas de même pour les autres, qui n’avaient suivi que de loin le mouvement de la matière imposable comme celui des transformations économiques du pays.

Mais à côté de leurs défauts indiscutables, les vieilles contributions, qui pendant un siècle avaient fait l’assise principale de nos finances, possédaient des mérites certains : une productivité régulière, assurée, croissante ; nulle trace d’arbitraire ni d’inquisition ; une certaine souplesse même, qui ne demandait qu’à être développée. La maison était vieille, mais au lieu de la démolir, il fallait la réparer. Il fallait rajeunir et « justifier » ce système fiscal, en lui conservant ses caractères traditionnels et français. Ses lacunes pouvaient être comblées. L’impôt foncier des terres pouvait être transformé en impôt de quotité, et ses bases rectifiées par une nouvelle évaluation de la propriété rurale. Les Patentes, « ces vieilles connaissances dont on dit beaucoup de mal, mais dont on ne saurait se passer, » pouvaient aisément être perfectionnées. Si l’impôt des portes et fenêtres devait disparaître, on pouvait, de la contribution mobilière, réorganisée elle aussi en impôt de quotité, mieux équilibrée et établie non plus sur le loyer seul, mais sur un ensemble d’indices extérieurs, faire un impôt complémentaire sur le revenu fort acceptable. L’équité fiscale devait être recherchée dans la paix du système « indiciaire » et réel.

C’est, au contraire, à ce principe réel et indiciaire, tout autant qu’aux défauts reconnus des vieilles contributions, que s’attaquaient les partis avancés. Rejetant la « fiction » des signes extérieurs et de la réalité de l’impôt, ils voulaient atteindre le revenu directement, saisir la personne même du contribuable, par un mécanisme fiscal moderne qui, doté des derniers perfectionnements du genre, introduirait enfin la justice sociale dans l’ordre de la « distribution tributaire. » Entre les tenants de l’une et de l’autre thèses, la lutte se poursuivit longtemps, dans le feu des passions, et bien que le courant radical fût politiquement le plus fort, qui sait si, sans la guerre, la « révolution fiscale » eût jamais triomphé ? Le projet Caillaux, avec force amendements démagogiques, fut voté par la Chambre le 9 mars 1909, et transmis au Sénat qui lui fit l’accueil le moins empressé et l’ajourna de fait pendant plusieurs années. Ce n’est qu’au début de 1914 que les pouvoirs