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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




La manœuvre, durant toute cette quinzaine, n’a pas cessé de se développer au gré de la pensée qui la conduit; des scènes héroïques et glorieuses se sont ajoutées à la tragédie ; de nouvelles perspectives ont été ouvertes dans le jardin français. Les écrivains militaires expliqueront à loisir pourquoi elle est belle, pourquoi elle a été féconde, et pourquoi elle a mérité de demeurer comme un modèle. Nous, qui devons courir après les événements comme emportés d’un mouvement furieux, et qui pouvons à peine jalonner par des points les lignes fuyantes, nous nous contenterons d’en sentir la beauté, et d’affirmer, plus que nous ne l’exprimerons, notre admiration confondue avec notre reconnaissance. Admiration pour les chefs et pour les soldats, pour les nôtres et ceux de toutes les nations alliées, reconnaissance pour l’effort et le résultat. Oui, de quelque fièvre que nous aient brûlés ces quatre années mortelles, nous tenons en bride, à deux mains, nos désirs et nos espérances, nous ne voulons en connaître l’orgueilleuse joie qu’au fur et à mesure de leur réalisation. Mais les armées de Foch réalisent presque aussi rapidement que nous pourrions imaginer.

Les semaines précédentes nous avaient rendu Château-Thierry, Montdidier, Soissons. Elles nous avaient amenés aux portes de Chaulnes, de Roye, de Lassigny, de Noyon. Celles-ci ont, non pas achevé, mais poursuivi l’œuvre. Nous sommes à Chaulnes, à Roye, à Lassigny, à Ham, à Chauny, les Allemands ne sont plus à Noyon. Ils ont perdu, dans les Flandres, le mont Kemmel; le général Plumer les a chassés de Bailleul. Pied à pied, les généraux Horne et Byng les rejettent des approches d’Arras, et, leur ayant enlevé Croisilles, dent par dent, mordent, au Nord de Quéant, sur la charnière septentrionale de la fameuse position Hindenburg; Bapaume est repris, la route de cette ville à Cambrai menacée. Combles est repris, Péronne