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bons effets. La progression du premier jour fut plus lente. Le centre de l’ennemi avança assez vite, mais les deux ailes maintenues restèrent en retrait ; le deuxième jour, il dut redoubler d’efforts pour pousser ses avantages jusqu’à l’Aronde. A l’aube du troisième, il était évident que l’ennemi allait porter son aile droite à la hauteur de son centre pour supprimer ce dispositif en pointe et élargir la poche. L’intervention des réserves était imminente, et de ce nouveau choc dépendait l’issue de la bataille.

Notre contre-attaque préventive survenue a ce moment brisa le ressort de la machine allemande prêt à se détendre. L’ennemi, au lieu d’exploiter ses gains de la veille, dut songer à se défendre et à nous empêcher de l’étrangler dans la nasse où il était engagé. Les divisions amenées pour compléter l’avance s’usèrent à cette tâche. Nos gains de terrain furent médiocres ; nous avions trop peu de monde pour espérer refouler l’ennemi au point de compromettre sa sécurité et l’obliger à se replier. D’ailleurs, cette opération, outre qu’elle ne pouvait qu’être onéreuse, puisque notre contre-attaque se produisait sur un front particulièrement garni, n’offrait pas assez d’avantages stratégiques pour compenser le sacrifice des quelques disponibilités qui nous restaient pour faire face aux événements. Ainsi le commandement ne perdait pas de vue sa politique d’économie. La journée du 11 juin marque l’arrêt de l’offensive du 9. L’ennemi progressera trois jours encore sur sa gauche dans les bois de Ribécourt et atteindra le Matz ; il n’aura pas la force de pousser jusqu’à Compiègne. Les attaques entreprises en même temps à l’Ouest de Soissons pour pénétrer dans la forêt de Villers-Cotterets ne recueilleront également que des avantages partiels. De plus en plus, il semble difficile d’obtenir de larges gains sans des pertes formidables quand on heurte un ennemi prévenu disposant de forces même inférieures.

Dès lors, l’ennemi renonce à parachever la stabilité de ses lignes pour porter tous ses soins à jouer le troisième acte de la manœuvre. Il doit se hâter. Le danger américain qu’il a dédaigné commence à l’inquiéter. Son contact avec ces jeunes troupes dans la région de Belleau-Bouresches lui a fait soupçonner la valeur des nouveaux belligérants.

L’offensive du 27 mai, celle du 9 juin, ont attiré le gros des troupes françaises entre l’Oise et l’Ourcq. D’autre part, les