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dû à sa qualité et les présents d’usage », montante quelques centaines de francs.

A la tendance contraire se rapportent les multiples défenses aux bateaux étrangers de passer sous les ponts de certaines rivières, d’exporter les denrées d’une province dans l’autre, les exactions du fisc entravant les transports permis, les escortes onéreuses que l’on contraignait les marchands à prendre sur les grands chemins et les confiscations auxquelles les navires se trouvaient exposés dans les ports, sous de futiles prétextes, de la part des États voisins qui satisfaisaient ainsi leurs griefs réciproques.


V

Non que les traités de commerce fissent défaut ni les lois internationales sur la mer ; il s’en voyait au contraire de vénérables par leur antiquité, toutes stipulant liberté « absolue »… sauf que les neutres, en cas de guerre, trouvés à bord de navires appartenant à des belligérants, étaient traités en ennemis. Pour les marins de leur propre pays, les coutumes n’étaient guère tendres au moyen âge : celle de Saint-Malo porte que « le pilote ou locman, si le vaisseau s’empire par faute qu’il ne sait pas conduire, il doit réparer les dommages s’il a de quoi et, s’il n’a de quoi, il doit avoir la tête coupée. »

Quoique, dès le XVIIIe siècle, l’on se fût interdit mutuellement de laisser débarquer et vendre les marchandises apportées par des brigands « écumeurs et autres gens laborant sur la guerre, » la voie maritime, par sa nature la moins chère de toutes, demeurait la plus dangereuse. Sans admettre ce que prétendent les marchands de Rouen sous Louis XIII que les bateaux de harengs et de morues fussent dévalisés dans la Manche par des pirates, il est bien connu que la Méditerranée fut une ferme fructueuse pour les Barbaresques jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Le taux du fret s’en ressentait : de Messine à Marseille, la soie payait 180 francs les 100 kilos ; de Bilbao à Nantes, la laine ne payait que 22 francs.

Le quintal de laine, il est vrai, devait en outre 129 francs de droits de sortie. Le protectionnisme à rebours fut longtemps pratiqué par la plupart des nations d’Europe, au moyen d’une taxe sur les exportations qui, de 6 p. 100 au minimum, s’élevait