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jantes de toutes les voitures roulant fardeau, dit-il, sont trois fois plus larges qu’elles n’étaient ci-devant… large bandage que nous avons enfin imité des Anglais. »

Avant que l’invention, puis le progrès des chemins de fer n’eussent abaissé graduellement le coût des transports aux 4 centimes et quart où nous le voyions en 1913, une première réduction, très importante, avait été obtenue de 1800 à 1855 par la triple amélioration des routes, des véhicules et des chevaux, ces derniers multipliés par l’élevage, tandis qu’ils étaient sous l’ancien régime bien peu nombreux. Le roulage accéléré ne coûtait plus, à la fin du règne de Louis-Philippe, que 44 centimes environ et le roulage ordinaire que 26 centimes par kilomètre.


III

Ce tarif, appliqué il y a soixante-dix ans aux charrois de plusieurs tonnes, eût semblé incroyable au temps de Louis XVI, où l’on payait 1 franc sur routes de terre. Le prix de 26 centimes n’était obtenu aux siècles passés que sur les fleuves ou les canaux. Bien qu’on puisse noter au moyen âge des transports par eau depuis 6 centimes jusqu’à.60 pour des marchandises identiques, pour des pierres par exemple, les frets ne descendaient guère au-dessous de 14 centimes sur la Loire ou le canal de Briare et ils ne s’élevaient pas en général au-dessus de 30 centimes sur le canal du Languedoc, sur la Garonne ou sur le Rhin.

Or, le fret sur canal ou sur rivière, que l’on peut évaluer à 21 centimes jadis, était en moyenne avant la guerre d’un centime par tonne kilométrique, réduit ainsi des 10 vingtièmes, dans une proportion presque pareille à celle des routes de terre du XVIIIe siècle comparées aux chemins de fer actuels. Ici, le phénomène semble au premier abord moins explicable : la navigation fluviale s’est pourtant radicalement transformée.

Elle évolue sans cesse : qui croirait que les rivières françaises, après s’être allongées de 1 000 kilomètres de 1847 à 1887, se sont raccourcies depuis vingt-cinq ans de 1300 kilomètres ? Non qu’elles aient géographiquement diminué et qu’elles n’occupent plus la même place sur la carte, mais économiquement leur longueur utile, d’abord prolongée par le commerce,