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maintes villes, dont une vingtaine en France, obtiennent des Universités. Mais autant il encourage chaque nation à suivre ses voies, autant il sauvegarde l’unité nécessaire du christianisme dans chaque nation. Les Universités où elles s’élèvent édifient l’architecture identique de leurs institutions. Là, toujours présente et partout reine, est la science qui apprend à l’homme les lois à jamais immuables de sa dépendance envers Dieu son créateur et de ses devoirs envers tous les hommes, ses frères. Cette certitude est tenue pour la plus précieuse de toutes ; c’est dans son atmosphère que sont plongées et que respirent les sciences particulières ; elle vivifie le droit, l’histoire, les lettres, les arts même. Sous son inspiration, les sciences humaines s’appliquent chacune à son objet sans entrer, par aucun de leurs constats, en conflit avec la vérité plus sûre et plus nécessaire qu’elles. De ces sciences, les unes, telles la médecine et le droit, conduisent à l’exercice d’une profession ; les autres, telles la philosophie, la rhétorique, l’histoire et ce qu’on possédait alors de calcul et de physique, n’ouvrent accès à aucune carrière, mais, en cultivant tout l’esprit, mettent sa fécondité en équilibre. « Les arts, » c’est-à-dire les savoirs qui ne rapportent à l’homme ni lucre ni places, que tout homme doit posséder sans aucune idée d’avantage à en tirer, sinon le profit inestimable d’avoir un fonds général de philosophie, de littérature et de science sont, dans l’ordre de la dignité, les premiers. Il ne sera pas permis de se consacrer aux sciences qu’on peut exploiter en métiers, le droit, la médecine, avant d’avoir fait ses preuves dans les savoirs qui par eux-mêmes ne menaient à rien.

Comme la nature de l’enseignement, la voix de l’enseignement est partout la même, celle des premiers professeurs, les prêtres, le latin, devenu grossier en passant par trop de bouches barbares, mais moins barbare que les dialectes nationaux encore à leurs bégaiements. Il y a une seule langue du savoir. Cette unité de l’éducation dans la différence des pays aide l’enseignement même. Les titres décernés par une Université sont valables partout ; les chaires de toutes sont ouvertes aux étrangers comme aux nationaux. Les maîtres illustres sont invités à porter de l’une à l’autre leurs leçons, et ce leur est l’occasion de répandre vite et loin leur renom et leurs pensers ; les étudiants aussi changent de contrée par