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inappréciables à l’ennemi en achevant quelques-uns des travaux de destruction commencés, besogne qui, autrefois, était toujours accomplie par l’artillerie au cours d’une préparation qui durait des journées au lieu d’heures. »

Le pour et le contre semblent assez bien résumés dans cet exposé du journaliste anglais. La grande pierre d’achoppement du canon d’infanterie est évidemment la difficulté d’approvisionner en munitions, à travers les bombardements du champ de bataille, ce mangeur de projectiles qui est d’autant plus vorace qu’il tire plus vite et que les projectiles qu’il lance sont plus puissants : autrement dit, il tire ses faiblesses de l’excès même de ses qualités. C’est pour cela sans doute que, si important qu’ait été le rôle du M. W. il a été singulièrement dépassé par celui des mitrailleuses légères dont l’approvisionnement et le déplacement sont bien plus aisés et qui, tirant soit en tir tendu, soit même en tir courbe, en barrage (d’après la conception ancienne du capitaine français Carrier), ont été véritablement les outils essentiels des succès temporaires remportés par l’ennemi. Il faut y ajouter, naturellement, l’effet de surprise que l’ennemi a obtenu par divers procédés, et notamment par l’emploi intensif et rapide d’obus à gaz ; il faut y ajouter aussi l’esprit offensif qui permet, par des concentrations habiles, d’être, là où l’on attaque, d’une supériorité écrasante sur l’ennemi, fût-il même plus nombreux sur l’ensemble des lignes.

Il n’en reste pas moins que les canons d’infanterie sont des engins précieux et indispensables, et que l’ennemi en possède incomparablement plus que nous. Certes, ce n’est qu’un des éléments du problème tactique, puisque malgré cela la victorieuse contre-offensive de Foch a donné les brillants résultats que l’on sait. C’est qu’heureusement notre général en chef disposait, en grandes quantités, d’une arme qui paraît être, comme je l’ai dit naguère ici même, le canon d’accompagnement idéal : le tank, et surtout le tank léger, qui transporte lui-même ses munitions, qui est peu vulnérable aux balles à cause de sa cuirasse, aux obus à cause de sa mobilité, et qui ajoute à son armement contre le personnel l’effet d’écrasement de sa masse contre les obstacles matériels.

Mais, comme le prix des tanks est élevé, que leur fabrication en grand nombre, — où nous avons d’ailleurs une supériorité qu’il faut espérer voir conservée, — est longue et difficile, il ne faut point négliger cette autre solution, moins parfaite, mais aussi plus rapide et meilleur marché du problème de l’accompagnement : le canon d’infanterie.