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Un peu avant, elle s’est, par un de ses affluents, reliée à la Champagne : c’est la Suippe qui lui apporte les eaux blanches du camp de Châlons et la lie à la région de la Marne avec laquelle elle ne va pas cesser de voisiner. En elîet, après avoir pénétré dans le large couloir dont Beaurieux au Nord et Maizy au Sud marquent à peu près l’entrée, baigné, sur sa rive droite, Soupir, Chavonne, Vailly et Condé, — tous noms qui nous sont aujourd’hui si familiers, — elle reçoit, en aval de cette dernière localité, au pied du plateau de Chivres, la Vesle, autre rivière bien champenoise, car elle ne traverse Fismes et Braisne qu’après avoir eu la gloire de mirer dans ses eaux la royale ville de Reims qu’elle rattache ainsi étroitement à la région de l’Aisne. Elle relie par ailleurs celle-ci à la basse Marne par son voisinage avec la vallée de l’Ourcq ; car, peu après Fismes, à Bazoches, la Vesle a paru courir au-devant de la riviérette qui, à Fère-en-Tardenois, n’en est guère éloignée de plus de quatre lieues et séparée que par un mouvement de terrain. L’Ourcq et la Vesle sont les rivières qui, en 1914 comme en 1814, ont mené une partie de nos armées de la Marne à l’Aisne derrière les Prussiens en retraite.

Après avoir recula Vesle, l’Aisne a sensiblement son plein : elle coule des eaux lentes, « paresseuses » écrira French, mais qui, parfois, se gonflent de redoutable façon, sous les ponts de Venizel et de Soissons, le long des bourgs de Pommiers, de Vie, d’Attichy, de Rethondes et de Choisy-au-Bac et apporte, en amont de Compiègne, son important tribut à l’Oise.

C’est l’Oise qui, coulant, elle, beaucoup plus délibérément » du Nord-Est au Sud-Ouest, met la région de l’Aisne en communication directe avec l’Ardenne belge et française au Nord, la Picardie et la Normandie au Nord-Ouest, la région proprement parisienne au Sud. Aisne et Oise se valent à peu près par leur débit lorsqu’elles se rencontrent et ce sont leurs eaux qui, mariées, viennent arroser Compiègne, Verberie, Creil, avant d’aller, au Nord de Saint-Germain, grossir la Seine. Les deux rivières sont du même « système. » Elles embrassent entre leur cours l’énorme massif accidenté qui, entre Noyon, Chauny, la Fère, Laon, Craonne, Beaurieux, Soissons et Compiègne, va nous retenir.