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Quartier Général, avec la sûreté et la précision d’un mécanisme bien réglé, ne l’oubliera de sa vie.

Sous l’impulsion et le contrôle de chefs tels que ceux-là, on pouvait beaucoup attendre des divisions roumaines. C’était compter sans la défection russe. L’Entente n’y eût sans doute pas résisté, si à la même époque n’avaient surgi la décision du président Wilson et la déclaration de guerre des Etats-Unis.

La quatrième année des hostilités a vu se développer les conséquences fatales de la défection russe et poindre, plus rapidement qu’il n’était permis de le prévoir, les premiers résultats de la coopération des Etats-Unis. Paris, sous le canon ennemi, comme Londres sous les Gothas, a gardé le calme et la tenue qui conviennent à des capitales dignes de leurs peuples et de leurs armées. La cinquième année de guerre trouve tous les peuples de l’Entente maîtres de leurs nerfs, sûrs de leur volonté, résolus à aller jusqu’au bout.


Comment oublieraient-ils que les maux subis depuis quatre ans passés, les deuils innombrables infligés, les pertes de toute nature accumulées, l’ont été par la volonté d’un homme et d’un peuple étroitement unis dans une folie de domination ?

La responsabilité de la guerre, l’Allemand a tout tenté pour la rejeter de ses épaules. La diplomatie tudesque a d’abord essayé d’attribuer à la Belgique l’initiative et la préparation du conflit : réédition sans grâce et sans profit d’une fable trop connue. Elle a voulu imputer à la France l’odieux de l’agression ; ses propres compatriotes l’ont saisie en flagrant délit de mensonge : la légende de l’avion français survolant Nuremberg fut démentie par le bourgmestre de la cité allemande. Elle a accusé l’Angleterre : invention ridicule, lorsqu’on se rappelle les initiatives multiples, les efforts incessants du gouvernement britannique au long des douze jours qui séparèrent l’ultimatum autrichien de la déclaration de guerre afin d’obtenir une solution pacifique. En désespoir de cause, l’ingénieux M. de Kühlmann dans le discours qui fut son chant du cygne, s’est avisé de dénoncer le tsarisme : c’était bien joué. Un léger détail s’oppose à ce que cette dernière invention trouve même un instant créance près de l’auditoire le mieux disposé. Je veux parler de la dépêche que, le 29 juillet 1914, Nicolas II adressait au Kaiser pour lui demander de soumettre le différend