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sur la Brenta. » Nous avons avancé, » c’est-à-dire « nous avons attaqué » sur la.Piave et sur la Brenta; « nous nous sommes retirés sur la Piave, » c’est-à-dire de l’autre côté de la Piave; « nous n’avons gardé que certaines régions sur la Brenta, » c’est-à-dire « nous avons été repoussés devant Asiago et sur le mont Grappa ; » ou plutôt c’est ne pas le dire, et la prétérition est forte. Mais il suffit de traduire el de commenter. Pourquoi, au surplus, l’armée de Boroevic s’est-elle retirée ? « Pour éviter des pertes de vies humaines » (ce qui n’est pas, évidemment, le principal objet de la guerre, sans quoi il serait si simple de ne pas la faire), « le maintien de ses positions devant entraîner des pertes énormes. » En conséquence, les positions n’ont pas été maintenues; pourtant, les pertes n’ont pu, à ce prix, être évitées, et pourtant, elles ont été « énormes;» M. Wekerlé va dire davantage : elles ont été « gigantesques. » Premièrement en prisonniers. Le premier ministre hongrois s’arrête au chiffre de 12 000 prisonniers; et, comme preuve de sa sincérité, il invoque les rapports du général Diaz lui-même. Précédemment, on avait dit 8 000, parce qu’alors le général Diaz disait 8 000; après que le général Diaz a dit 12 000, M. Wekerlé dit 12 000: il s’en rapporte à la personne qui doit être la mieux informée. Maintenant les Italiens disent 20 000, et M. Wekerlé dirait sans doute: 20 000, soit.

« Beaucoup plus triste, ajoute-t-il, est la statistique de nos pertes en morts, blessés et malades, car il faut dire que la plus grande partie de nos pertes est constituée par des malades. » La confidence est extrêmement intéressante. Tant de malades ! et de quelle espèce de maladie? Tout de suite une idée se présente à l’esprit, tout de suite un mot monte aux lèvres : « Et la faim? » s’écrie un député. Mais le président du Conseil ne répond pas : il ne se souviendra que plus tard d’avoir entendu. M. Wekerlé continue : « Le chiffre des malades et blessés ne peut pas être exactement fixé, parce que, d’ordinaire, on prend comme base, pour en établir le compte, le chiffre des troupes qui reviennent. » Si, cette fois, on ne peut pas ou l’on n’ose pas procéder comme à l’ordinaire, serait-ce qu’il en est revenu trop peu ? Et s’il en est revenu trop peu, mais si les Italiens n’ont fait que 12 000 ou même que 20 000 prisonniers, où sont les autres? M. Wekerlé ne suit pas jusqu’au bout le général Diaz; il ne dit rien des 20 000 hommes qui se seraient noyés dans le désordre de la retraite, en voulant repasser le fleuve. Mais, tout affligé, il le reconnaît : « Nous avons subi des pertes gigantesques