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activisme wallon. Elle a spéculé pour le succès de l’un comme de l’autre sur les terribles privations que le peuple endure et sur le mécontentement engendré par la misère. Le peu de terrain, gagné çà et là par l’activisme, provient effectivement de ces deux causes. L’activisme a poussé aussi, comme une plante vénéneuse, en Wallonie. Il s’efforce d’y propager l’idée du séparatisme, semée déjà dans quelques cerveaux avant la guerre ; il s’abrite prudemment, de même que son confrère flamand, sous les plis du drapeau impérial. Des journaux wallons, avec l’appui de l’occupant, pratiquent une politique parallèle à celle des feuilles germanisées de Gand, d’Anvers et de Bruxelles.

Aux utopistes wallons, partisans sincères de la séparation, bornons-nous à répéter ceci : toute campagne séparatiste ne peut se faire qu’au profit de l’Allemagne. La continuation du régime administratif, instauré par feu Bissing, a pour corollaire une occupation militaire allemande, et ce serait l’annexion déguisée du pays tout entier. Nos ennemis ne parlent que de la côte flamande, mais, pour s’y installer, il faut tenir la vallée de la Meuse, et les canons, qui des dunes de la mer du Nord resteraient pointés contre l’Angleterre, auraient passé préalablement par Liège et par Namur.


L’Allemagne a l’intention, — elle l’affirme du moins, — d’introduire la question flamande devant les assises de la paix, de la faire juger par le Congrès des nations ; c’est ce qu’on appelle d’un néologisme courant « l’internationaliser. » En vertu de quel droit ? Du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Au moyen des activistes, l’Allemagne rééditerait la comédie de consultation nationale, que nous l’avons vue machiner à Berlin avec des députations de Courlandais, d’Esthoniens et de Lithuaniens. D’infimes minorités sans mandat, triées parmi ses clients germaniques, ont été proclamées par elle les organes de la volonté populaire. Ne nous laissons pas prendre à une manœuvre aussi grossière. Qui ne sait aujourd’hui, par l’exemple des provinces russes, que le droit des peuples n’a de valeur aux yeux des hommes de Berlin que s’il est camoufle en droit germanique, servant à des fins purement germaniques ? L’internationalisation de la question