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rédigé n’est, — il suffit de le relire pour en être convaincu, — qu’un compte rendu de ses entretiens, destiné à son chef, le ministre de la Guerre.

Pendant la longue série d’épreuves auxquelles il a fait face, le gouvernement de notre résistance nationale n’a pas dévié, que je sache, de la ligne de conduite que s’étaient tracée ses prédécesseurs du temps de paix. Il est resté le défenseur de l’indépendance et de la neutralité de la Belgique, indignement violées par deux des Puissances qui avaient juré de les garantir. Il n’était pas et ne pouvait pas être un belligérant ordinaire, ni accepter que son rôle combatif fût réduit, comme le prétendait l’Allemagne, à cette simple condition. Eût-il abandonné une attitude, dictée par sa fidélité au pacte qu’avaient souscrit ses devanciers, fût-il descendu volontairement de ce piédestal isolé, la protestation de la conscience humaine et de l’opinion publique, révoltées du manque de foi de nos ennemis, n’aurait été ni aussi unanime ni aussi vibrante en sa faveur.

Au cours de la guerre, la France, l’Angleterre et la Russie ont tenu à renouveler, par la déclaration de Sainte-Adresse du 14 février 1916, « les engagements qu’elles avaient pris envers notre pays héroïquement fidèle à ses obligations internationales. » Elles l’ont fait en tant que « signataires des traités garantissant l’indépendance et la neutralité de la Belgique. » Cette démarche était un hommage éclatant rendu à l’attitude du gouvernement du Havre.

Cependant, quelques Belges soutiennent que la violation du statut de notre neutralité par l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie a délié la Belgique de ses engagements envers la Pentarchie. Ce mot grec, — qui veut dire gouvernement de cinq chefs, — désigne dans leur pensée les cinq Puissances l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie a délié la Belgique de ses engagements envers la Pentarchie. Ce mot grec, signataires des traités de 1831 et de 1839. La Belgique avait conclu un traité avec cinq Puissances solidaires et non pas avec chacune d’elles isolément, et ce traité n’ayant pas été observé, lorsque son application était exigée, elle se trouverait dégagée des obligations qu’elle-même avait remplies scrupuleusement. Lord Derby, secrétaire d’Etat pour les Affaires étrangères, disait, en revanche, à la Chambre des Lords, le 4 juillet 1867, que les Puissances, qui furent parties à la Conférence de 1830, s’étaient engagées solidairement et « individuellement » à maintenir l’intégrité du traité conclu par elles.