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commandant du sous-marin, » et, en cas de divergence de vues, elle propose une fois encore l’arbitrage à la Haye.

Il y a loin de cette déclaration aux précédentes et réconfortantes promesses de l’ambassadeur. L’horizon politique se retrouve brusquement aussi sombre, et la situation, — aggravée maintenant du scandale Dumba, — plus tendue encore qu’elle ne l’était au lendemain du coulage de l’Arabic. Les pacifistes ne soufflent plus mot. Au département d’État, on ne cache pas l’extrême désappointement qu’a causé le ton singulièrement cavalier de la note. Dans les cercles et les quelques salons qui se rouvrent, à Washington, on prédit le renvoi prochain de von Papen, et on envisage avec regret celui de l’ambassadeur autrichien, qui doit entraîner le départ de la charmante Mme Dumba. Bref, le pessimisme est partout. Et il est tel cette fois qu’à Berlin même on ne peut manquer de le voir. Le département d’Etat fait en effet savoir officieusement, par l’ambassadeur Gérard, son mécontentement à la Wilhelmstrasse et l’expression décisive qu’il est prêt à en donner.

En Allemagne, d’autre part, c’est le moment où les résultats de la déclaration de guerre italienne se font sentir sur l’opinion allemande plus fortement qu’on ne l’avait pensé. L’effet produit sur cette opinion par l’entrée en guerre d’un nouvel et aussi puissant ennemi de l’Allemagne que les Etats-Unis, ne pourra manquer d’être détestable. Sans doute reconnaît-on enfin, parmi les intransigeants du parti de la force, qu’on s’est trop avancé et qu’à laisser aller les choses plus loin, cette fois on perdra tout. Le temps de la réflexion fut court, mais il porta ses fruits. Deux jours seulement se sont écoulés, et le gouvernement de Berlin fait savoir qu’il a désormais transmis à son ambassadeur à Washington pleins pouvoirs pour agir suivant ses propres plans et au mieux de son inspiration. C’est, de la part de l’opposition et de la Wilhelmstrasse, la capitulation sans phrases et, pour l’ambassadeur, le succès complet. Il lui suffira désormais d’attendre, de guetter le moment d’intervenir.

Il laisse donc passer la nouvelle crise qui pourrait être soulevée par la publication des documents Archibald, où l’ambassadeur Dumba déclare le Président self-willed et où l’attaché militaire von Papen qualifie les Américains d’idiotic yankees. Le péril tourné, il reprend les choses en main et publie, le 5 octobre, la fameuse note qui provoque le coup