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Rocheuses, et qu’ils ont intention de visiter le Mexique. L’instinct policier des reporters américains reste en défaut ; les meilleurs se mettent en campagne : aucun ne parvient à joindre les attachés fantômes. Les comparses de l’ambassade, ainsi qu’il est d’usage, s’étonnent, ne savent rien, croient qu’il y a erreur, admettent l’exagération et la complicité de l’Angleterre, affirment surtout que tout s’éclaircira bientôt et pour le mieux de la réputation de l’Allemagne et de ses ministres.

A l’ambassade anglaise, le charmant conseiller qui expédie les affaires en l’absence de sir Cecil Spring Rice, dit avoir lu les révélations dans le journal The World, insiste sur l’évidente authenticité des documents photographiés, déclare n’être d’ailleurs nullement surpris des agissements allemands, mais répète à qui veut l’entendre qu’il ne sait rien de plus.

Cependant, chaque jour, impitoyablement, les révélations continuent. Les intrigues de l’Allemagne se découvrent dans tous les domaines. Les complicités s’affirment et se multiplient. On s’inquiète, on s’agite dans les sphères officielles, lie bruit se répand dans le public que le gouvernement, après une première et secrète enquête, a recueilli les preuves accablantes qui suffiront à justifier une action énergique. On attend, on réclame le rappel des agents de l’Allemagne. On se refuse à croire que l’immunité diplomatique les couvre. On assure que le Président, sous la poussée de l’opinion indignée, est décidé à prendre les plus énergiques mesures contre ceux qui ont abusé de leurs fonctions, commis des attentats, multiplié les crimes, violé enfin, de toutes les manières, l’hospitalité que l’Amérique leur a offerte.

Quatre jours ont déjà passé. L’émotion n’a fait que croître. L’indignation est au comble. Cependant contre les accusations aucune protestation n’est encore venue. Aucun démenti n’a été donné. Tous ceux qui sont mis en cause se tiennent cois. Bien plus, tous demeurent également introuvables. Les affaires se gâtent de plus en plus pour l’Allemagne. Les officiels du Cabinet déclarent maintenant ouvertement que jamais les relations avec les Empires centraux n’ont été plus tendues, jamais la situation n’a été aussi grave… C’est au plus fort de cette surexcitation, le 19 août, quatre jours exactement après les premières publications du World, que les journaux annoncent le torpillage sans