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4 pour 100 ; sur 800 000 francs, cela fait 32 000 francs de rente, dont l’impôt nouveau retrancherait environ un vingtième, ramenant ainsi le revenu réel aux environs de 30 000 francs, c’est-à-dire 3 pour 100 du capital possédé. L’amputation par rapport au rendement normal de 5 pour 100 sur un million de francs serait des deux cinquièmes. Pour une fortune de dix millions, l’impôt s’élèverait à 62 325 francs. Appliqué à un revenu de 400 000 francs, il représenterait une charge additionnelle de près de 16 pour 100, c’est-à-dire qu’il porterait l’impôt global sur le revenu, dont le taux prévu pour l’année courante est de 20 pour 100, à 36 pour 100. A l’échelon de vingt millions rapportant 800 000 francs de rente, l’impôt Métin réclamerait 204 025 francs, qui s’ajouteraient à 160 000 francs d’impôt global sur le revenu. La somme des deux impôts atteindrait alors 364 000 francs, c’est-à-dire 46 pour 100 du revenu.

N’oublions pas que ces 46 pour 100 seraient loin de représenter la totalité des prélèvements fiscaux. L’impôt cédulaire fait son œuvre. Les valeurs mobilières au porteur qui, de nos jours, constituent une partie importante des patrimoines, supportent un ensemble de droits qui, pour les actions et les obligations, s’élèvent à quelque chose comme 12 ou 14 pour 100 du revenu. C’est donc près des trois cinquièmes du revenu, et davantage, qui seraient absorbés dans certains cas. Nous ne craignons pas d’affirmer que c’est là une conception inadmissible, destructive de tout ordre économique et de nature à avoir des conséquences désastreuses pour le pays. Qui ne voit que des hommes ainsi menacés perdront le goût du travail, de l’économie, et songeront plutôt à dépenser leur capital, condamné à une amputation périodique, qu’à le conserver ou à l’accroître ? Or, rien n’est plus nécessaire que l’esprit d’épargne dans un pays à budget énorme comme le nôtre et qui doit pouvoir compter sur une matière imposable se développant sans cesse. La seule façon d’y aider, c’est de ne pas toucher au capital existant et d’encourager par tous les moyens possibles la formation de capitaux nouveaux.

L’impôt sur le revenu est une nécessité. Accepté aujourd’hui par beaucoup de ceux-là même qui le combattaient avant la guerre, il a seulement besoin d’être amélioré dans son assiette et contenu dans de justes limites. On nous cite sans cesse l’exemple de l’Angleterre et on fait miroiter aux yeux de nos