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l’Amour brode, la Danse devant le miroir), et les pièces idéologiques (la Nouvelle Idole, le Repos du lion, la Fille sauvage). Dans les premières, l’analyse prédomine presque exclusivement, tandis que les secondes sont pleines de discussions oratoires ou d’effusions lyriques. D’autre part, il y a dans l’Envers d’une sainte, l’Invitée ou l’Amour brode une sûreté de composition qu’on ne retrouve ni dans la Nouvelle Idole, ni dans le Repas du lion, ni dans le Coup d’aile. Mais, de par sa richesse même et sa diversité, cette œuvre s’accommode mal des distinctions trop rigoureuses ; et sans nous enfermer dans des catégories, nous emprunterons à l’Invitée comme au Repas du lion, à la Figurante comme à la Fille sauvage, les arguments ou les exemples qui permettent d’étudier chez M. de Curel l’ouvrier dramatique ou le psychologue, le moraliste ou le poète.

Tous ses sujets d’abord ont quelque chose de rare, sinon d’exceptionnel ; et Sarcey lui-même les eût difficilement ramenés, comme ceux de Racine, aux faits divers de notre vie banale.

Pour sauver sa race, un vieux gentilhomme fait épouser à son fils la femme qui fut leur maîtresse à tous deux, et introduit dans sa famille l’enfant dont il ne peut savoir s’il est le père ou le grand-père (les Fossiles). — Une jeune fille abandonnée de son fiancé se venge par un crime, et se punit en prenant le voile. Elle sort du couvent dix-huit ans plus tard, après la mort de l’infidèle. Et dix-huit ans plus tard, retrouvant dans son cœur, comprimé mais non dompté, le même orgueil, la même jalousie, les mêmes rancunes violentes et froides, elle retourne au cloître pour ne pas redevenir criminelle (l’Envers d’une sainte). — Une jeune femme trahie abandonne son mari, ses deux filles, et vit quinze ans dans un exil sentimental où le désenchantement succède à l’exaspération. Un jour, le mari l’appelle au secours de ses filles dont il compromet l’avenir par des faiblesses sans dignité et sans joie. Elle part, attirée par la curiosité, un reste d’amour, plus que par le sentiment maternel ; et c’est l’Invitée. — Pour garder son amant, une femme inquiète imagine de le marier à une jeune fille qu’elle juge intelligente et ambitieuse, mais sans cœur ni tempérament ; la jeune fille accepte, mais avec de tout autres intentions que celles qu’on lui prête, et c’est la lutte inévitable et féroce (la Figurante). — Deux jeunes gens s’aiment et personne ne s’oppose à leur bonheur ; mais ce sont deux êtres compliqués,