perte. Son état futur immédiat ne dépend pas seulement de son état statique actuel, comme on le suppose volontiers pour écrire ses équations, mais aussi de tout son passé. Il nous donne l’impression d’évoluer comme un organisme vivant ou comme un groupe d’êtres organisés. Il ne passe jamais deux fois par le même état et il doit aboutir à une fin.
Telles sont du moins les apparences et nous avons appris à nous méfier des apparences. Ne nous hâtons pas de conclure dans un sens ou dans l’autre, d’autant plus que la conclusion en vaut la peine, puisqu’il s’agit de savoir si les constatations mécaniques actuelles impliquent une création évoluant vers un terme ou l’éternité. C’est l’attitude de rigoureuse prudence qu’a adoptée l’Énergétique. Si nous nous livrons à notre imagination, si nous raisonnons dans l’abstrait, toutes les conclusions seraient possibles mais sans valeur. On peut dire que nous avons mal cherché la compensation qui doit exister en réalité à la dégradation de l’énergie causée par le travail. On peut assimiler les faux équilibres, où intervient la notion de temps, à des équilibres réels de forces. On peut supposer qu’un jour ou l’autre quelque artifice à découvrir nous permettra de faire machine arrière et de récupérer les énergies dégradées en chaleur depuis le commencement du monde. On peut même aller beaucoup plus loin et supposer que l’inversion se produira spontanément, quand les temps seront accomplis, pour lesquels nos lois physiques sont valables. Un fait d’observation, qui ne répond pas à une nécessité logique, si évident qu’il nous semble par habitude, reste toujours exposé à se trouver remplacé par un fait inverse. Concevons, par exemple, un monde, où, alternativement, chaque fois pendant quelques millions de siècles, les élémens se trouveraient électrisés, tantôt positivement, tantôt négativement ; une courbe qui, tantôt nous ramènerait vers une source d’énergie étrangère à notre uniyers, tantôt nous en éloignerait… On peut imaginer tout cela ; mais aussi tout cela peut rester purement imaginaire. Bornons-nous donc, pour le moment, à observer les relations des faits entre eux sans conclure.
Cette attitude de prudence absolue est-elle humainement possible ? Il faut bien avouer que l’Énergétique elle-même ne s’y conforme pas jusqu’au bout et qu’elle prête le flanc à quelques objections, notamment par le rôle trop spécial que ses