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une formelle rectification, précisant avec détail les entrevues préliminaires de Francfort et de Berlin, et attestant à nouveau l’accord absolu de tous jusqu’au moment de l’étrange défection de l’évêque de Strasbourg : « Je n’ai pas, concluait M. Germain, à rechercher quels sont les motifs qui ont pu déterminer Mgr Raess à prendre l’attitude qui lui a valu, — après les insultes qui nous avaient été prodiguées, — les applaudissemens du parlement allemand ; ce que j’affirme, c’est que mon collègue et ami Teutsch a agi avec la plus entière loyauté, c’est que ce qu’il a dit et dit hautement, pour notre honneur à tous, avait été convenu d’avance et était connu de chacun de nous. La conduite de Mgr Raess vis-à-vis de ses collègues est donc absolument injustifiable et ne saurait être atténuée par aucune espèce d’explication[1]. »

Noyé dans ce déluge de réprobation, l’évêque de Strasbourg, en une lettre adressée au Journal d’Alsace’ et communiquée en même temps à Paris au journal catholique le Monde, essayait de pénibles explications. Après avoir constaté avec mélancolie que ses paroles lui ont valu et continuent à lui valoir « une avalanche d’injures et de malédictions, » il avoue avoir signé « à son corps défendant » la motion de M. Teutsch, pour ne pas se séparer dès le principe de ses collègues alsaciens-lorrains, conservant toutefois l’espoir « de trouver… une occasion favorable d’expliquer ou de rectifier la pensée en ce qu’elle pouvait présenter de discutable et de moins correct. »

Il expose ensuite l’accueil de haine fait par le Reichstag au discours de M. Teutsch ; « m’étant douté, ajoute-t-il, de cette déplorable issue, j’avais, avant l’ouverture de la séance, fait demander à M. le président si, le cas échéant, il m’accorderait la parole, quoique deux de mes collègues l’eussent déjà demandée. Mon intention était de calmer la Chambre en donnant une courte explication de notre position vis-à-vis du traité de Francfort. Ma demande ne m’ayant pas été immédiatement accordée, ni refusée, je ne songeais plus à prendre la parole quand, vers la fin du discours Teutsch et au milieu d’un effroyable tumulte, le président m’offrit, par un billet, la parole. Ma réponse étant affirmative, je dus, en montant à la tribune, prendre une résolution aussi prompte qu’inattaquable au point

  1. Moniteur universel, 2 mars ; Temps, 4 mars.