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possession tout un manuscrit de lui sur ce sujet, qui n’est pas d’un style à faire sourire ceux qui le liront.

« Je vous prie donc instamment de ne point me faire dire, par M. Montégut, que je ne connais pas bien la vie et les pensées intimes de mon frère. Après avoir vécu quarante ans sous le même toit que lui, mangé à la même table, et passé les nuits à écouter ses confidences, je ne pourrais pas laisser sans réponse le reproche de l’avoir peu connu ou oublié. Vous m’obligeriez ainsi, soit à réfuter l’article de M. Montégut, soit à publier ma grande Biographie plus tôt que je n’ai l’intention de le faire. Croyez que je suis en mesure d’apprendre à ceux qui pensent connaître mon frère bien des choses qu’ils ignorent.

« Je suis d’ailleurs très obligé des renseignemens que vous m’avez donnés verbalement, à l’appui de votre lettre du 1er février sur les premières relations d’affaires entre mon frère et M. Charpentier, et je vous en remercie. Ils pourront nous être utiles, à ma sœur et à moi, si nous sommes forcés de plaider contre cet éditeur… Mais je ne puis pas accepter la leçon que me donne votre lettre du 1er février. Je sais tout ce qui intéresse la vie de mon frère, et quand je parle peu sur ce sujet, ce n’est pas faute d’avoir bien des choses à dire. Je suis très bon enfant et fidèle ami ; mais si quoiqu’un, par la voie de la publicité, venait à me marcher sur la queue, je me redresserais de façon à le dégoûter d’y revenir. Ce ne serait pas la première fois.

« Tout à vous cependant et sans rancune,

« Paul de Musset[1]. »

À la réception de cette lettre, qu’il trouva « vive, » F. Buloz envoya son fils Louis à P. de Musset, avec sa réponse. Mais le frère du poète ayant compris, je pense, qu’il avait dépassé la mesure et ayant « retiré » sa lettre, Louis Buloz ne crut pas devoir lui faire lire celle de F. Buloz, et la rapporta à son père. Sur le double de la lettre du directeur de la Revue, je lis cette note :

  1. Inédite.