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de la Somme a mis hors de doute que les Alliés fussent capables d’atteindre ces objectifs. L’armée allemande est le pilier de la défense des Puissances centrales, et une bonne moitié de cette armée, malgré l’avantage de la défensive appuyée sur les ouvrages les plus forts, a été battue sur la Somme cette année. Ni les vainqueurs, ni les vaincus ne l’oublieront, et, quoique le mauvais temps ait donné du répit à l’ennemi, il y a certainement dans ses rangs des milliers d’hommes qui commencent la nouvelle campagne avec peu de confiance dans leur capacité, soit de résister à nos assauts, soit de surmonter notre défense. »

Telle est la conclusion du commandant des forces britanniques. Le Bulletin des Armées, d’autre part, publiait le 27 septembre un récit des opérations du 1er juillet au 17 septembre, et il arrivait à la même conclusion. Il constatait l’ampleur du résultat tactique : 180 kilomètres de terrain conquis, soit 10 kilomètres de plus que les Allemands n’en avaient réellement conquis en six mois devant Verdun. Les seules armées françaises avaient fait 30 000 prisonniers non blessés. Mais il ne faut pas juger la bataille au terrain enlevé. L’objectif véritable n’est pas reportable sur la carte. C’est la destruction des forces vives de l’ennemi. Or, du 1er juillet au 17 septembre, les Allemands avaient « engagé dans la bataille de la Somme 67 divisions nouvelles et 17 bataillons, dont 34 divisions sur le front anglais et 33 divisions, plus 17 bataillons sur le front français, ce qui fait 310 bataillons contre les Anglais et 312 contre nous. » C’est la moitié des forces allemandes en France, qui sortaient de la lutte diminuées physiquement et moralement. Et la première bataille de la Somme a été ainsi un progrès de plus vers cette rupture définitive d’équilibre qui s’appelle la victoire.


HENRY BIDOU.