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de l’orthodoxie. Il n’ignorait pas non plus les visées des tsars russes au sujet de la cité impériale, mais il comptait sur son étoile, sur son habileté et sur les ennemis de la Russie pour les écarter de son chemin. Je dois à la vérité de dire que des étrangers très compétens qui comparaient, il y a quelques années, les progrès accomplis par les différens États de la péninsule, l’esprit et la force de leurs armées, les qualités laborieuses de leurs habitans, étaient enclins à considérer les Bulgares comme les héritiers les plus probables des Turcs sur les bords de la Marmara et du Bosphore.

Ferdinand Ier n’a attiré l’attention inquiète de l’Europe qu’au bout de vingt années de règne. Jusque-là il avait seulement piqué sa curiosité. Mais, à partir de 1908, il n’a pas cessé d’occuper les chancelleries des gouvernemens et les oreilles du public du bruit causé par son ambition. Ce n’est pas lui faire trop d’honneur, ainsi qu’à son peuple, que de les ranger, à cause de la seconde campagne balkanique de 1913, qui avait laissé la péninsule bouleversée et non pacifiée et la question d’Orient rouverte et dangereusement élargie, parmi les fauteurs de la guerre mondiale.


II

Le second prince de Bulgarie a profité de la bonne fortune de n’avoir pas été appelé à régner le premier sur la nouvelle principauté. Un autre a essuyé les plâtres de la résidence princière. Un autre avait été aux prises avec les difficultés extrêmes du début. Elles provenaient à la fois de la tutelle accaparée par la Russie, comme conséquence légitime de la libération du peuple bulgare par les armées du Tsar, et des mœurs politiques de ce peuple, doté sans transition, au sortir de la servitude, d’une complète liberté. Ferdinand a bénéficié des erreurs, des tâtonnemens, de l’inexpérience d’Alexandre, comme aussi de ses succès. Quand il a été élu, la réunion de la Roumélie orientale à la Bulgarie était un fait accompli et la victoire de Slivnitza avait valu à la jeune nation le respect de ses voisins et la considération étonnée des grandes Puissances.

Les sept années du premier règne avaient servi encore à délivrer la Bulgarie de toute ingérence étrangère. Les Bulgares, peuplade d’origine touranienne, n’ont emprunté aux Slaves que