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ÉMILE OLLIVIER
EN 1848
D'APRÈS SON JOURNAL INTIME


I. — LA PRÉFECTURE DE MARSEILLE

A la date du 27 février 1848, on lit dans le Journal d’Emile Ollivier : « Gloire et bénédiction à Dieu ! En quelques heures, il a renversé une monarchie puissante et affranchi le peuple. La République est proclamée. J’osais à peine espérer qu’elle se réaliserait après de longues années. Et elle existe, reconnue par tous. Combien j’oublie de douleurs en ce jour ! Je pars, accompagné de mon père, pour Marseille. Je suis nommé commissaire du gouvernement dans les Bouches-du-Rhône et le Var. Je suis effrayé de cette mission : que vais-je trouver dans ces pays ardens ? Au milieu de ma frayeur se glisse cependant la lueur d’espérance. J’ai en moi de si grands trésors d’amour à répandre qu’il me semble que je réussirai. »

La plus imprévue et peut être la plus formidable de nos révolutions, celle qui déchaînait sur la France la puissance sans frein du suffrage universel, venait de s’accomplir. Le parti républicain, surpris lui-même par sa victoire offrait peu d’hommes capables de faire face à cette situation. Lorsqu’on eut placé tous les vétérans, on chercha parmi la jeunesse. Emile Ollivier était un des plus désignés parmi les jeunes. Son talent qui s’affirmait et qui commençait à être connu, son caractère qui inspirait le respect et la sympathie le signalaient à