Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 43.djvu/419

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

adressées des deux côtés opposés, et par les Venizelistes aussi bien que par leurs adversaires :

— Ce n’est pas chose nouvelle, lui répond en riant M. Jonnart. Que Votre Majesté se souvienne de La Fontaine et de la fable célèbre : Le Meunier, son Fils et l’Ane.

— J’ai La Fontaine dans ma bibliothèque, répond Alexandre, et je vais relire cette fable.

Pour terminer, M. Jonnart promet au Roi de se rendre immédiatement à son appel toutes les fois que le jeune souverain éprouvera le besoin d’être renseigné ou conseillé.

Une mesure essentielle est la rupture des relations avec les Empires du Centre ; elle cause au Roi une vive émotion : M. Politis en fait part à M. Jonnart. Cette rupture va entraîner la guerre que le Roi désirerait épargner à son peuple. Mais sur ce point M. Venizelos n’admet aucun compromis, aucune défaillance. Son arrivée aux affaires ne pouvait signifier autre chose qu’une déclaration de guerre à l’Allemagne et à ses alliés. Le Roi ne l’ignorait pas. Ayant accepté le principe, il doit accepter les conséquences. La guerre est voulue par le parti venizeliste qui représente la majorité du pays. Par conséquent, la guerre se fera. Afin qu’aucune équivoque ne subsiste, M. Venizelos expose nettement ses vues sur ce grave sujet, au cours d’un entretien qu’il a deux jours plus tard avec le souverain.

Le dimanche 1er juillet ont lieu deux très belles cérémonies. Les troupes prêtent serment au Roi sur le Champ de Mars. Le défilé est excellent. Une foule nombreuse reconduit M. Venizelos jusqu’à son hôtel. Après le défilé, un Te Deum est célébré à la cathédrale, en mémoire des soldats grecs tombés en Macédoine : M. Venizelos et le général Regnault, commandant notre corps de débarquement, prononcent de très éloquens discours. L’enthousiasme est des plus vifs.

Voilà un mois exactement que M. Jonnart et sa mission ont quitté Paris. Les brillans résultats qu’ils ont obtenus en si peu de temps sont de nature à les satisfaire pleinement. L’opinion publique en France et en Angleterre est unanime à se féliciter de l’heureuse tournure prise par les événemens. A Athènes, la tranquillité est complète. Le Haut-Commissaire fait, par l’intermédiaire du ministre de la guerre, féliciter le général Regnault pour la façon très heureuse dont il s’est acquitté de sa mission.