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soumet au Roi. Ce dernier ne fait aucune objection, sauf en ce qui concerne la création de deux ministères nouveaux. Il est décidé que les ministres prêteront serment le lendemain matin, à onze heures, et, sur leur demande, en redingote, beaucoup d’entre eux, par suite de leur départ précipité de Salonique, n’ayant pas apporté leur habit. Le métropolite, qui a prononcé l’anathème contre M. Venizelos, ne peut pas décemment présider la cérémonie de prestation du serment. C’est le directeur du séminaire qui le remplacera.

Ce soir-là, M. Jonnart offre, au restaurant du Phalère, un diner aux membres de la légation, aux officiers généraux et aux états-majors français des troupes de terre et de mer. La musique d’un de nos régimens joue la Marseillaise et l’hymne grec, aux applaudissemens d’une foule très nombreuse. Tout le monde se prépare pour la grande journée du lendemain.


De très bonne heure, le mercredi 27 juin, des bataillons français occupent les points principaux de la ville : les places, les jardins du Zappeïon, les abords du Palais Royal et de l’hôtel de la Grande-Bretagne où doit descendre M. Venizelos. Ces troupes sont renforcées par les quatre cents gendarmes crétois. À onze heures, les automobiles amenant les nouveaux ministres débouchent de l’avenue du Phalère près de l’Arc d’Hadrien. Elles se rendent au Palais où la prestation de serment a lieu.

Quand M. Venizelos sort, il est acclamé par la foule. Pas un cri discordant. Du balcon de l’hôtel qui donne sur la place royale, il prononce quelques paroles. Nombre d’amis viennent le saluer et le féliciter dans ses appartemens où, le long des corridors, les gendarmes crétois, gardes du corps fidèles, exercent une surveillance attentive. Quelques lettres de menaces ont été envoyées au nouveau président du Conseil : mieux vaut prendre toutes les précautions.

Vers la fin de la journée, une grande manifestation se déroule sur la place. La foule réclame M. Venizelos. Celui-ci paraît sur le balcon d’où il prononce un éloquent discours :

« Il y a aujourd’hui dix mois, dit-il, que les Bulgares ont pénétré en Macédoine (Cris de la foule : A bas les Bulgares ! ) et que le quatrième corps d’armée grec a été fait prisonnier.